Ivresse livresque

Une floraison d’ouvrages autour du peintre

Le Journal des Arts

Le 24 octobre 2003 - 1004 mots

À l’occasion du centenaire de la mort de Gauguin (1848-1903), les nouvelles publications consacrées à l’artiste sont légion. Nous vous en proposons une sélection.

 Voyage express à Tahiti
Résumés historiques, commentaires d’œuvres et citations de Gauguin émaillent ce minilivre dédié aux séjours tahitiens de l’artiste et signé Claire Frèches-Thory, conservateur en chef au Musée d’Orsay et commissaire de l’exposition du Grand Palais. Il ne manque à cette collection qu’une chronologie sommaire et des légendes complètes – comme toujours dans les “Découvertes Gallimard”, le lieu de conservation des œuvres fait cruellement défaut.
- Claire Frèches-Thory, Gauguin à Tahiti,  Découvertes Gallimard, en coédition avec la RMN, 48 p., 7,50 euros. ISBN 2-07-030156-7.

Gauguin de A à Z
La collection “ABCdaires” s’est, elle aussi, enrichie d’un volume sur Gauguin. Claires et didactiques, ses 80 notices déclinent, après un court récit biographique, les lieux, (Le Pouldu, Pérou, Pont-Aven, Tahiti…), les contemporains (Émile Bernard, Van Gogh, Pissarro), les techniques (céramique, gravure, photographie), les courants stylistiques (impressionnisme, symbolisme, synthétisme) et les œuvres qui comptèrent dans la vie de l’artiste.
- Isabelle Cahn, ABCdaire de Gauguin, 120 p., 100 ill., éd. Flammarion, 9,95 euros. ISBN 2-08011-096-9.

L’œuvre commenté
Des premières toiles influencées par Pissarro aux dernières œuvres tahitiennes, ce livre organisé en notices évoque, dans une traduction parfois maladroite, l’itinéraire plastique de Gauguin.
- Peggy Vance, Gauguin, 160 p., 100 ill., 25 euros. ISBN 2-85025-873-3.

Pour en finir avec les idées reçues
“Un mythe persistant entoure Gauguin. Dans les ouvrages les plus sérieux, la méconnaissance de la Polynésie et de sa culture, la non-vérification d’informations colportées perpétuent des images inexactes du peintre et du pays où il vécut dix ans, ainsi que des interprétations incomplètes ou fantaisistes de ses toiles”, écrit Paule Landon. Pour mettre fin aux idées reçues, cette dernière a suivi les traces de l’artiste en Polynésie, où elle vit depuis trente ans. Illustré de photographies anciennes, son livre ressuscite le Tahiti et les Marquises de la fin du XIXe siècle et nuance, voire dénonce l’image du Gauguin “mauvais mari, père indigne, alcoolique, obsédé sexuel, débauché, débauchant, quémandant son absinthe, bradant ses œuvres”. Quitte à en faire parfois un peu trop…
- Paule Landon, Tahiti-Gauguin. Mythe et vérités, 112 p., 70 ill., éd. Adam Biro, 45 euros. ISBN 2-87660-352-7.

Une vie en images
Pour mieux appréhender la vie du peintre, on pourra également consulter la superbe monographie de Stéphane Guégan, parue dans la nouvelle collection “L’aventure de l’art” des éditions du Chêne. Spécialiste de la première moitié du XIXe siècle, l’auteur propose de “réinscrire l’imaginaire, la culture et l’œuvre de Gauguin dans l’héritage romantique”. Retraçant les grandes étapes de la carrière de l’artiste en évitant l’écueil du sensationnel ou de la dramatisation, son livre se distingue par sa très riche iconographie et sa maquette séduisante, point fort de cette nouvelle collection.
- Stéphane Guégan, Gauguin, le sauvage imaginaire, éd. du Chêne, 224 p., 250 ill., 52,90 euros. ISBN 2-84277-482-5.

Le parfum envoûtant de “Noa Noa”
Ensemble de feuillets manuscrits, peintures à l’aquarelle, gravures et photographies, Noa Noa (“très parfumé” en maori) a été réalisé et composé par Gauguin entre 1894 et 1896. Sauvé de la dispersion par l’écrivain Victor Segalen, ce chef-d’œuvre méconnu est aujourd’hui conservé au cabinet des Dessins du Musée du Louvre. Les éditions Assouline en reproduisent les plus belles pages, commentées par l’écrivain et critique d’art Marc Le Bot.
- Paul Gauguin, Noa Noa, voyage de Tahiti, éd. Assouline, 80 p., 40 ill., 16 euros. ISBN 2-90822-845-9.

Gauguin contre la critique
Publié une première fois en 1951 puis très vite épuisé, Racontars de rapin est enfin disponible aux éditions Mercure de France. Refusés en 1903 par cette même maison, alors dominée par la figure de Camille Mauclair, féroce ennemi de Gauguin, les Racontars ont été rédigés par l’artiste aux Marquises, quelques mois avant sa mort. Cet “article de contre-critique”, selon les propres mots du peintre, stigmatise avec force, clairvoyance et ironie, la critique d’art de son temps. Rappelant qu’à “toute époque l’erreur est possible” – “il y a une vingtaine d’années, le Pauvre Pêcheur et L’Enfant prodigue de Puvis de Chavannes moisissaient rue de la Paix, chez Durand-Ruel, sans pouvoir se vendre”, se souvient notamment l’artiste –, Gauguin remet en question les compétences et la toute-puissance de ces “hommes de lettres”, plus calés en littérature qu’en peinture. “Comment dire à un littérateur de talent, estimé de tout le monde : Monsieur, vous avez tort quoiqu’instruit, honnête et convaincu”, s’interroge l’artiste. Et de poursuivre un peu plus loin, à propos d’un critique affirmant qu’Albert Besnard est le dernier des grands peintres connaissant la composition et le dessin : “De quel droit ce critique mal avisé vient parler de science ? Sait-il où commence le dessin et où il finit ? Où a-t-il appris tout cela ? Savoir dessiner n’est pas dessiner bien”… Éclairé par une présentation, des notes et une postface de Bertrand Leclair, ce texte n’a, un siècle après sa rédaction, rien perdu de sa pertinence.
- Paul Gauguin, Racontars de rapin, éd. Mercure de France, 85 p., 12 euros. ISBN 2-7152-2407-9.

Et aussi :
- Laurence Madeline, Ultra-Sauvage. Gauguin sculpteur, éd. Adam Biro, 224 p., 45 euros. ISBN 2-87660-353-5 (lire le JdA n° 171, 16 mai 2002).
- Carole Andréani, Les Céramiques de Gauguin, éd. de l’Amateur, 160 p., 50 euros. ISBN 2-85917-358-7 (lire le JdA n° 171, 16 mai 2002).
- Jean-Yves Tréhin, Tahiti, L’Éden à l’épreuve de la photographie, éd. Gallimard, 224 p., 200 ill., 45 euros (lire p. 9).
- Gauguin, Tahiti-Marquises, catalogue de l’exposition organisée par le Musée de Tahiti, 143 p., éd. Somogy, 30 euros. ISBN 2-85056-645-4.
- Jean-François Rebeyrotte, Paul Gauguin, éd. Somogy, 168 p., 20 euros. ISBN 2-85056-663-2. Ce bel ouvrage présente les lettres de l’artiste en regard de tableaux peints à la même période.
- Et, pour les amateurs de roman : Mario Vargas Llosa, Le Paradis – un peu plus loin, éd. Gallimard, 532 p., 25 euros. ISBN 2-07-076913-5. L’auteur péruvien brosse, à travers deux récits parallèles, la quête d’absolu de Flora Tristan, militante féministe et ouvriériste, et de son petit-fils Paul Gauguin.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°179 du 24 octobre 2003, avec le titre suivant : Ivresse livresque

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