Bâle (Suisse)

Irritant Kintera

Musée Tinguely Jusqu’au 28 septembre 2014

Par Virginie Duchesne · L'ŒIL

Le 25 août 2014 - 313 mots

Le Musée Tinguely présente la première grande rétrospective de Kristof Kintera, artiste praguois de 41 ans.

Pour l’événement, le sculpteur, visage enfantin sous son chapeau à bord court, se prête volontiers au jeu du commentaire et de l’interview, mais avoue détester cela. Issu de la performance et du théâtre, nourri au grotesque et au surréalisme tchèque, il fait fi du discours sur ses œuvres qu’il modifie régulièrement, tout comme leurs titres, pour privilégier l’impact immédiat sur le public. À partir d’objets que ce dernier connaît bien a priori, il opère un léger décalage par rapport à la réalité quotidienne en les modifiant ou en détournant leur usage. D’une apparente simplicité, le glissement vers l’absurde et l’ironie noire provoque une brèche suffisante où se loge nervosité et questionnement sur des thèmes de société : sécurité à outrance, surconsommation, peur de la mort… Ce glissement peut être plein d’humour quand il s’agit du lampadaire brisé en deux qui gît dans le parc et pourtant éclaire toujours. Ou les barrières de sécurité devenues des cerfs s’ébrouant dans le parc du musée. Il est plus irritant au son de la rengaine Pay taxes, taxes, taxes, pay!,  répétée à l’envi par un corbeau en costume. Il devient angoissant quand la révolution s’incarne dans un garçon se tapant la tête contre le mur, le détruisant peu à peu (2005) ou qu’un étrange personnage cornu dans la pénombre cogne contre un verre et une grosse caisse au rythme des mauvaises nouvelles du monde (Bad News, 2011). Kintera pousse cette nervosité, née de l’inconfort et du questionnement, dans l’espace du musée en modifiant son entrée, forçant les habitués à en redécouvrir l’architecture. Jusqu’au catalogue d’exposition même, qui se présente sous la forme d’une boîte à chaussures contenant une pile de documents de travail de l’artiste, livrant tout son processus sans discours, ni chronologie de l’œuvre. Lui-même ne dira rien de plus.

« I’m not You »

Musée Tinguely, Paul Sacher-Anlage 2, Bâle, www.tinguely.ch

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°671 du 1 septembre 2014, avec le titre suivant : Irritant Kintera

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