Redécouverte

Il Todeschini, en scène !

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 16 décembre 2005 - 533 mots

Après Chambéry et Le Havre, le Musée des beaux-arts de Reims accueille les tableaux réalistes de l’artiste lombard d’origine autrichienne, maître des scènes de genre.

 REIMS - Peintre d’origine autrichienne, Giacomo Francesco Cipper, dit « Il Todeschini » (1664-1736), a passé toute sa carrière à Milan (lire l’encadré), où il a trouvé la reconnaissance artistique. Pleinement inscrit dans le style réaliste lombard précédant les Lumières et nourri d’influences nordiques, Cipper, très apprécié à son époque, est aujourd’hui méconnu du grand public français, bien que représenté dans plusieurs collections publiques nationales. Après le Musée des beaux-arts de Chambéry et le Musée Malraux du Havre, les scènes de genre de Todeschini font aujourd’hui escale, pour une dernière étape, au Musée des beaux-arts de Reims, qui conserve deux toiles de l’artiste.
Le parcours de l’exposition évoque plus généralement le courant réaliste des XVIIe et XVIIIe siècles en confrontant les œuvres de Todeschini à celles de ses prédécesseurs, tels Eberhart Keilhau (1624-1657) ou Felice Boselli (1650-1732), et à des artistes postérieurs comme Giacomo Ceruti (1698-1767) et Gaspare Traversi (1722-1770), dont est présentée la grinçante Joueuse de mandoline. « Rejetée en France, la peinture de genre était très en vogue en Italie et fortement appréciée des collectionneurs », précise David Liot, directeur du musée et commissaire de la manifestation à Reims.
Interpellations
La veine réaliste puise ses sources dans le théâtre, comme en témoigne ce tableau de Boselli, Cuisinier, servante et provisions, dont le personnage de gauche, peint grandeur nature, provoque le spectateur du regard, dans une expression délibérément narquoise. Ou encore L’Éducation en famille, de Keilhau, composition au centre de laquelle la mère interpelle le visiteur, tandis que ses enfants regardent dans des directions différentes. On retrouve ces éléments dans les tableaux de Todeschini, tel Un Buveur, portrait d’un personnage édenté, émergeant de la pénombre d’un intérieur pauvre, qui semble trinquer à notre intention, ou Le Maçon, qui prend une pose pour le moins solennelle malgré son aspect miséreux. « Il n’y a pas d’ironie, ni même de mépris dans ces toiles, au contraire, Il Todeschini montre un profond respect pour le peuple », précise David Liot. De Pietro Bellotti (Italie du Nord), Il Todeschini emprunte le goût pour la représentation du caractère psychologique des personnages, tandis que sa palette et les thèmes abordés rappellent l’œuvre de Keilhau. Pour Béatrice Sarrazin, commissaire scientifique de l’exposition, un autre groupe d’artiste aurait joué un rôle important dans l’art de Cipper : celui formé à Rome autour de Pieter Van Laer dit « Bamboccio » (1592/95-1642).
S’enrichissant au contact de ses contemporains, Il Todeschini a su développer son propre style, avec un intérêt particulier pour les petites gens ainsi qu’un goût prononcé pour le rire et la mise en scène théâtrale.

AUTOUR DE GIACOMO FRANCESCO CIPPER

Jusqu’au 8 janvier, Musée des beaux-arts, 8, rue Chanzy, 51100 Reims, tél. 03 26 47 28 44, tlj sauf mardi et jf, 10h-12h et 14h-18h. Catalogue, éd. Fage, Lyon, 120 p., 25 euros, ISBN 2-8497-0445. - Commissaire scientifique : Béatrice Sarrazin, conservatrice en chef à l’inspection générale des Musées de France - Commissaire de l’exposition rémoise : David Liot, directeur du Musée des beaux-arts de Reims - Nombre d’œuvres : 36 tableaux (dont 20 de Todeschini)

Mystérieux Todeschini

Issu d’une famille aisée, Giacomo Francesco Cipper dit « Il Todeschini » est né en 1664 à Feldkirch (Autriche). Aucun témoignage ne rend compte de ses années de formation ni même de la date de son départ pour l’Italie. Sa présence est attestée à partir de 1696 à Milan où il meurt en 1736. Peu d’éléments permettent de saisir précisément l’évolution stylistique de Cipper, dont seulement quelques œuvres sont signées et datées. Il répétera souvent d’une toile à l’autre les motifs et figures. De ses commanditaires et acheteurs, on sait également peu de choses, mais les nombreuses copies anciennes de son œuvre confirment le succès de l’artiste.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°227 du 16 décembre 2005, avec le titre suivant : Il Todeschini, en scène !

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