Classicisme

Histoire de famille

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 3 février 2006 - 492 mots

Le Musée des Années 30 de Boulogne-Billancourt sort Augustin Rouart de l’ombre.

 BOULOGNE-BILLANCOURT - Être peintre, chez les Rouart, fut pendant longtemps de tradition
familiale. « Augustin Rouart : le réalisme magique », au Musée des Années 30 de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), lève le voile sur la production très personnelle de l’un des descendants de cette prestigieuse dynastie d’artistes, Augustin Rouart.
Petit-fils d’Henri Rouart (grand ami d’Edgar Degas), petit-fils d’Henri Lerolle, petit-neveu de Berthe
Morisot (épouse du frère d’Édouard Manet) et neveu de Julie Manet, Augustin Rouart aurait pu succomber au syndrome « fils de », décuplé ici au centuple. C’est en cultivant son indépendance que cet artiste autodidacte a eu, selon les termes d’Emmanuel Bréon, directeur du musée et commissaire de l’exposition, « l’humilité, sans doute à tort, de ne pas se faire reconnaître ». À ce titre, le fils d’Augustin, l’académicien et écrivain Jean-Marie Rouart, rappelle le caractère farouche de son père, lequel préférait rester en retrait et s’obstinait à peindre seul ce qu’il voulait, comme il l’entendait. Le petit format des œuvres présentées au Musée des Années 30 témoigne de cette intimité avec son art. Malgré une discrétion tenace, l’exposition « Au cœur de l’impressionnisme. La famille Rouart », qui s’est tenue au Musée de la Vie romantique à Paris au printemps 2004, a révélé, selon Pierre Rosenberg, président-directeur honoraire du Musée du Louvre, le talent d’Augustin Rouart, « seul grand peintre » de la famille.
D’un classicisme à toute épreuve, Augustin a cultivé la figuration sans ciller dans un XXe siècle converti à l’abstraction. S’il est fasciné par les maîtres hollandais, il laisse transparaître une connaissance parfaite de l’art de ses prédécesseurs, mais aussi de ses contemporains. On pense à Cézanne pour les natures mortes (Le Taureau en bronze, 1980, Jonquilles, livre et bronze, 1982), à Gauguin pour les couleurs (Lagrimas y penas, 1943), à Marquet pour le cadrage (L’Arbre sur la Seine, 1945), à Van Gogh pour le sujet (L’Enfant au citron, 1945), à Vallotton pour l’aspect plastique et décoratif (Le Nageur, 1943)…

Vibrant hommage
Dans son essai pour le catalogue, Adrien Goetz décèle dans les dessins d’Augustin l’influence d’Hans Holbein le Jeune, de François Clouet, d’Ingres et, bien entendu, de Degas. Cette pléthore d’inspirations, voire ce grand écart, peut déconcerter, sans pour autant déplaire. On ne saurait reprocher à Augustin d’avoir côtoyé la peinture de trop près.
La majorité des œuvres ici présentées appartiennent à Jean-Marie Rouart, heureux destinataire, en son temps, de délicieuses lettres illustrées que tout enfant rêverait de recevoir de son père. L’harmonie familiale et l’amour du père pour son fils y sont flagrants. Ce fils lui rend aujourd’hui un vibrant hommage.

AUGUSTIN ROUART : LE RÉALISME MAGIQUE

Jusqu’au 5 mars, Musée des Années 30, Espace Landowski, 28, avenue André-Morizet, 92100 Boulogne-Billancourt, tél. 01 55 18 46 42, www.boulognebillancourt.com, tlj sauf lundi et jours fériés, 11h-18h. Catalogue, coédité par Somogy et les Amis du Musée des Années 30, 160 p., 140 ill., 32 euros, ISBN 2-85056-951-8.

AUGUSTIN ROUART : LE RÉALISME MAGIQUE

- Commissaire : Emmanuel Bréon, directeur du Musée des Années 30 - Nombre d’œuvres : 143 (dont 124 d’Augustin – 94 peintures, 21 œuvres sur papier, gravures et céramiques) - Nombre de salles : 8 (dont l’entrée au rez-de-chaussée) - Nombre d’artistes : 9 (Berthe Morisot, Henri Rouart, Henry Lerolle, Julie Manet…)

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°230 du 3 février 2006, avec le titre suivant : Histoire de famille

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