Gabriel Laurin, l’oublié

Martigues fait redécouvrir un artiste des années trente

Le Journal des Arts

Le 28 mai 1999 - 453 mots

Peintre aixois décédé en 1973, Gabriel Laurin reste un inconnu. On ne trouve pas son nom dans les dictionnaires de la peinture, pas même dans le Bénézit. Son art a pourtant connu de belles saisons qui devraient lui valoir un peu de cette gloire qu’il semble avoir soigneusement négligée, méprisée peut-être. À voir ses dessins, ce ne serait que justice, surtout à l’heure où l’on redécouvre avec plaisir l’art français des années trente.

MARTIGUES - Le Musée Ziem présente non pas une rétrospective Gabriel Laurin (1901-1973), mais une sélection de ses meilleures œuvres – ce qui est toujours préférable quand il s’agit de faire découvrir un artiste –, et ce sont justement celles que Laurin a réalisées au cours des années trente, entre 1928 et 1942 exactement, avant de s’engager dans la Résistance aixoise où il a joué un rôle très actif. Cette sélection accorde la plus large place aux dessins (67 numéros sur 78) qui occupent deux salles, une troisième étant réservée aux peintures et une quatrième à divers documents sur la vie de l’artiste.

Manchot à la suite d’un accident, mais de constitution robuste et doté d’un caractère assez indépendant, pour ne pas dire farouche, plus naturellement proche des marginaux de tout poil que de la bourgeoisie satisfaite de sa ville natale, Laurin a fréquenté Cendrars, Giono, Tal-Coat, Calder, Darius Milhaud, et manié le revolver avec non moins de dextérité que le crayon et le pinceau. On pourrait s’en étonner en observant avec quelle douceur il ordonne ses paysages, qui paraissent toujours saisis d’un peu loin, figés dans la vision concentrique d’une lentille. Le cubisme est passé par là, mais il n’en reste qu’un usage très libre des plans, qui sont ici comme autant de fines parois de verre diversement poli. Quant aux figures, prédominantes dans les peintures, on y retrouve les franches oppositions entre des plans bien plats et de beaux volumes ronds et pleins, les incongruités d’échelle, les visages aux expressions sommaires, le rejet de toute finesse psychologique si caractéristique de l’art de cette époque. On pense à André Lhote, à La Fresnaye, à Léger bien sûr, mais aussi à Gruber, l’œuvre hésitant entre la recherche de formes simples et claires, un rendu presque naïf du monde et une tentation expressionniste.

Publié par les éditions Images en manœuvre, le catalogue donne une chronologie très détaillée de la vie de Gabriel Laurin, suivie de plusieurs études dues à Claude Duthuit, à Alain Paire, à Gérard Fabre, conservateur du Musée Ziem, et à Josiane Seguin.

GABRIEL LAURIN, LES ANNÉES 30

Jusqu’au 27 juin, Musée Ziem, boulevard du 14 Juillet, 13500 Martigues, tél. 04 42 80 66 06, tlj sauf lundi et mardi 14h30-18h30. Catalogue, éditions Images en manœuvre, 128 p., 100 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°84 du 28 mai 1999, avec le titre suivant : Gabriel Laurin, l’oublié

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