Fictionner la carte

Et même une fiction, avancent Eli Commins, directeur du Lieu unique, Patrick Gyger, directeur de Plateforme 10 à Lausanne et Alexandra Müller, directrice du Musée Jules-Verne, à Nantes, commissaires de l’exposition « Dans les plis des cartes ». Dans une scénographie déployée comme un paysage, l’exposition agence sans parcours défini une douzaine de projets à la diversité assumée. Aborder les imaginaires cartographiques conduit à y mêler art contemporain, art brut, création numérique, urbanisme et sciences. Chez les Aborigènes Anangu de APY Lands (Australie) ou chez les artistes François Burland, Ghazel et Mathias Poisson, la carte vient saisir un territoire vécu, et défait au passage les représentations que le pouvoir donne du territoire. Chez Michael Golz, Suzanne Treister ou Marie-Claire Messouma Manlanbien, elle s’émancipe de la géographie pour figurer fictions, rêves et états internes. Chez Kate Crawford & Vladan Joler, Frédérique Aït-Touati, Alexandra Arènes, Axelle Grégoire ou le studio Lemercier, elle assume plutôt une visée politique : en montrant ce qui ne se voit pas (la zone critique, la montée des eaux, l’architecture du pouvoir et de la technologie…), elle se fait outil de résistance. Cette diversité souligne la richesse de la cartographie et ses qualités de synthèse, mais frôle parfois le hors-sujet. On se demande notamment ce que viennent faire dans l’exposition les films de Liam Young et Suzanne Treister (ce ne sont pas des cartes), alors que la thématique offrait l’embarras du choix…