Et Dieu créa le photomontage

Rétrospective Hannah Höch à New York

Le Journal des Arts

Le 1 février 1997 - 502 mots

La Berlinoise Hannah Höch faisait partie des représentants allemands du mouvement Dada qui ont \"inventé\" le photomontage. Les États-Unis consacrent une rétrospective à son œuvre, caractérisée par une vision très personnelle de la femme des années vingt.

New York - Après le Walker Art Center de Minneapolis, le Museum of Modern Art de New York accueille les collages d’Hannah Höch (1889-1978), seule femme du groupe Dada de Berlin. Très admirée dans son Allemagne natale, Hannah Höch n’avait encore jamais fait l’objet d’une rétrospective d’envergure en Amérique du Nord, bien que la monographie que lui a consacrée Maud Lavin en 1993 (éditions Yale) ait attiré l’attention des spécialistes. L’exposition réunit une centaine de ses photomontages parodiques, ainsi que quelques exemples de ses travaux de graphiste et de son œuvre abstraite, provenant pour la plupart de collections allemandes.

Hannah Höch et ses amis du groupe Dada, George Grosz, Raoul Haus­mann et John Heartfield, ont "inventé" la technique du photomontage après la Première Guerre mondiale, en assemblant des images tirées de diverses publications à grand tirage pour formuler une critique souvent surréaliste de la société allemande à l’époque de la République de Weimar. En signe de protestation contre les hécatombes de la Grande Guerre, ces artistes ont cherché à abolir toutes les conventions artistiques et sociales afin de repartir à zéro.

Après la guerre, l’artiste a travaillé comme graphiste chez Ullstein Verlag, le plus grand éditeur allemand de revues illustrées où la femme libérée – la garçonne – tenait une place centrale. Hannah Höch, qui était homosexuelle, nous propose une autre vision du statut social et sexuel de cette image, montrant à quel point la prétendue émancipation de la femme était illusoire. La série En provenance d’un musée ethnographique, greffes de parties du corps tirées de peintures primitives sur des femmes contemporaines, tend à démontrer que l’attitude vis-à-vis des femmes a peu changé malgré les progrès accomplis par la civilisation occidentale. Les conservateurs ont retrouvé un grand nombre d’images originales qu’ils exposent à côté des collages de l’artiste. Ces documents, ainsi que l’examen de ses journaux intimes et de sa correspondance issus de la Ber­linische Gallerie, leur ont permis de rectifier un certain nombre d’inexactitudes de dates et de mieux préciser l’évolution du travail de Höch. Sous le régime nazi, elle s’est réfugiée dans la banlieue de Berlin, puis a renoncé à tout commentaire politique pour se vouer à des études biomorphiques abstraites. Elle s’est également beaucoup consacrée à l’horticulture, et a enterré dans son jardin des boîtes en bois contenant des œuvres de certains de ses amis du groupe Dada. Son intérêt pour l’abstraction a pris fin dans les années soixante. Elle est alors revenue à une réflexion sur l’image de la femme, avant de cesser son activité au début des années 1970 en raison d’une vue défaillante.

HANNAH HÖCH, 26 février-20 mai, Museum of Modern Art, 11 West 53 Street, New York, tél. 1 212 708 9400, tlj sauf mercredi 11h-18h, jeudi 11h-21h. Puis, Los Angeles County Museum of Art, 26 juin-14 septembre.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°33 du 1 février 1997, avec le titre suivant : Et Dieu créa le photomontage

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