Esprit d’escalier

Puvis de Chavannes, un génie décoratif

Le Journal des Arts

Le 25 septembre 1998 - 487 mots

Restauré et rendu à la lumière naturelle au cours de la dernière tranche de travaux au Palais Saint-Pierre, le cycle du Bois sacré que Puvis de Chavannes a peint pour l’escalier du bâtiment sert de fil directeur à l’exposition du Musée des beaux-arts de Lyon. Autour de cette œuvre monumentale in situ, 90 études pour d’autres grands projets rendent hommage au génie décoratif du peintre lyonnais.

LYON - Comme pour Gustave Moreau, cette année est celle du centenaire de la mort de Puvis de Chavannes. Pourtant, à l’exception d’une présentation de dessins au Musée d’Orsay, seul le Musée des beaux-arts de Lyon rend hommage au peintre lyonnais. Plutôt qu’à la facture classique et aux sujets historiques et lettrés de Puvis de Chavannes, le commissaire de l’exposition Pierre Vaisse attribue ce “difficile destin posthume” au domaine, aujourd’hui incompris, dans lequel s’est le mieux manifesté le talent de l’artiste : les grands décors monumentaux.

Avec les peintures murales du Bois sacré, de la Vision antique, de l’Inspiration chrétienne et du Rhône et de la Saône, le Palais Saint-Pierre a la chance de posséder l’une des plus belles réalisations de Puvis de Chavannes. Exécuté entre 1883 et 1886 pour orner le palier d’escalier menant aux collections de tableaux, cet ensemble fait suite à d’autres commandes du même style, le peintre ayant déjà décoré les escaliers du Musée d’Amiens, ceux des Beaux-Arts de Marseille, et ceux de l’Hôtel de ville de Poitiers qui abritait la collection d’art municipale. “Sa manière austère et sereine semblait particulièrement convenir à des lieux de contemplation et de méditation, voués au culte des idées et des arts”, analyse Pierre Vaisse.

Le père spirituel des modernes
Peu après, Puvis de Chavannes se mesurera d’ailleurs aux escaliers du Musée de Rouen et de la bibliothèque municipale de Boston, ainsi qu’aux parois de l’église Sainte-Geneviève, le futur Panthéon. Une sélection de 90 dessins, choisis parmi le fonds du musée, retrace les étapes créatrices de ces projets et montre son souci constant de s’adapter au cadre architectural.
Décorateur officiel par excellence, loué pour avoir su renouveler en douceur le langage allégorique et les schémas de composition du “grand art”, il n’en a pas moins joué un rôle de précurseur de la modernité. Certains, comme Gauguin ou Maurice Denis, reprendront en la synthétisant davantage encore sa vision idéale du bonheur primitif.

Mais son principal apport réside dans son goût du décoratif, qui le pousse à supprimer les modelés et le sentiment de profondeur, et à étager à la surface les différents éléments de ses compositions. Sa méthode, qui consistait à déplacer latéralement les figures sur un calque jusqu’à parvenir à un rythme idéal, annonce presque les recherches d’un Matisse.

LE BOIS SACRÉ, PUVIS DE CHAVANNES AU MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE LYON

1er octobre-6 décembre, Musée des beaux-arts, 20 place des Terreaux, Lyon, tél. 04 72 10 17 40, tlj sauf lundi et mardi 10h30-18h. Catalogue de Pierre Vaisse, Philippe Durey et Dominique Brachlianoff.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°67 du 25 septembre 1998, avec le titre suivant : Esprit d’escalier

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