Des portraits pleins d’esprit

Réhabilitation d’un genre en vogue sous Louis XIV

Le Journal des Arts

Le 13 juin 1997 - 531 mots

Alors que la mode du portrait a connu un formidable essor sous le règne de Louis XIV, ce genre n’a mystérieusement jamais fait l’objet d’exposition d’envergure. Nantes aujourd’hui, Toulouse demain le réhabilitent enfin et exposent près d’une centaine de portraits baroques aux signatures prestigieuses : Le Brun, Largillière, Mignard, Rigaud, de Troy…

NANTES. Peut-être parce que l’attribution d’un portrait de la seconde moitié du XVIIe siècle est toujours plus délicate que celle d’une peinture d’histoire de la même époque, ce genre a été relativement négligé par les conservateurs français. Résultat : attributions fantaisistes et identifications douteuses sont légion. "Quantité et qualité caractérisent pourtant la production du portrait louis-quatorzien, et nous avons naturellement été tentés de défricher ce domaine pour faire le point sur la question", déclare Emmanuel Coquery, conservateur des collections anciennes au Musée des beaux-arts de Nantes et commissaire scientifique de l’exposition. Ce quasi-recensement des collections publiques dans le domaine semble avoir atteint son objectif puisque près d’une vingtaine de portraits sur les quatre-vingt-huit tableaux exposés ont fait l’objet d’attributions nouvelles. Quelques-uns des principaux représentants du portrait de cour voient donc le nombre de leurs tableaux croître ou décroître à l’issue de cet examen approfondi. "Sept Louis Ferdinand Elle seront présentés alors qu’il n’y en avait guère que trois de repérés jusqu’alors, tandis qu’un "nouveau" Beaubrun sera présent à l’exposition, anciennement attribué à Renard de Saint-André (Niort). En revanche, un seul Jean Nocret a été maintenu sur une dizaine d’attribués", affirme Emmanuel Coquery, qui a également réattribué un Mignard à Charles de La Fosse, un portrait présumé de madame de Mon­tespan "dont les superbes couleurs se sont révélées après restauration". La quasi-totalité des tableaux sont prêtés par des collections publiques françaises – une quinzaine proviennent du château de Versailles. Les pastels, trop fragiles, sont exclus du champ de l’exposition, comme les miniatures "qui constituent un genre à part entière". En revanche, une cinquantaine de dessins et gravures seront présentés en fin de parcours.

Peindre l’esprit
Après une importante section chronologique où sont accrochées un tiers des œuvres, cinq sections thématiques se succèdent : le portrait du roi – Louis XIV en buste, en pied ou à cheval, en combattant ou en habit de cour –, le portrait historié – femmes du monde et aristocrates costumés en dieux antiques –, le portrait d’artiste et les autoportraits – Largilière, de Troy, Coypel, Desportes, Girar­don… –, le portrait dans le portrait et la fabrique du portrait : études, esquisses, réductions… Le fait que la physiognomonie, sorte de mor­pho­psychologie avant la lettre, ait connu un apogée au milieu du XVIIe siècle est loin d’être anodin. La connaissance du caractère par l’étude de la physionomie est une des questions centrales de ces "Visages du Grand siècle". Qu’il s’agisse de portraits emblématiques ou allégoriques, de portraits d’information ou mondains, l’exigence première était toujours de peindre l’esprit.

VISAGES DU GRAND SIÈCLE, LE PORTRAIT FRANÇAIS SOUS LE RÈGNE DE LOUIS XIV, 20 juin-15 septembre, Musée des beaux-arts, 10 rue Georges-Clémenceau, 44000 Nantes, tél. 02 40 41 65 65, tlj sauf mardi et JF 10h-18h, ven. 10h-21h, dim. 11h-18h. Puis au Musée des Augustins de Toulouse, 8 octobre-5 janvier 1998. Catalogue Somogy, env. 300 p., 300 ill., 280 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°40 du 13 juin 1997, avec le titre suivant : Des portraits pleins d’esprit

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