Archéologie

Scénographie

Des Mérovingiens pas assez mis en valeur

Par Margot Boutges · Le Journal des Arts

Le 22 novembre 2016 - 607 mots

Le Musée du Moyen Âge a réussi à réunir de nombreux objets rares sur les Mérovingiens autour d’une solide approche scientifique qu’une scénographie maladroite vient malheureusement desservir.

PARIS - L’exposition consacrée à l’art et la culture des temps mérovingiens, qui se tient au Musée national du Moyen Âge (Cluny), était très attendue. Elle crée l’occasion, qui ne s’était pas présentée depuis les années 1990 (1) d’embrasser trois siècles qui ont marqué en France la transition entre l’Antiquité et le Moyen Âge, et de renouveler la perception d’une période longtemps mal vue (de par ses origines « barbares » et germaniques), puis largement réévaluée au tournant des années 1950.
Le rassemblement d’environ 150 œuvres est à la hauteur des espérances. Isabelle Bardiès-Fronty, conservatrice à Cluny, et Charlotte Denoël et Inès Villela-Petit, conservatrices à la Bibliothèque nationale de France, ont largement puisé dans les collections de leurs institutions respectives, mais également dans celles du Louvre, du Musée d’archéologie nationale, du Musée Alfred-Bonno de Chelles, du Musée Sainte-croix de Poitiers pour composer un panorama extrêmement complet de l’art mérovingien. Un art que l’on peut sommairement définir par la pureté de ses formes, par l’immédiateté de ses symboles (souvent chrétiens) et par ses multiples influences (antiques, byzantines, d’Europe centrale…) comme l’explique  un essai du catalogue. Parmi les pièces exposées, plusieurs sont des signes directs du pouvoir royal, tels les ornements retrouvés dans la tombe de Childéric, la chasuble de la reine Bathilde ou le trône de Dagobert. D’autres illustrent plutôt la variété des techniques de création, comme la plaque-boucle de Saint Césaire, qui fige dans l’ivoire deux soldats endormis devant le Sépulcre, ou la châsse dorée de Mumma en cuivre repoussé. Au final, il ne manque dans cette présentation presque aucun des chefs-d’œuvre qui scandent les pages consacrées aux Mérovingiens dans les manuels d’histoire de l’art.

Une scénographie malheureuse

Mais une exposition ne saurait être résumée à une sélection d’œuvres, aussi magnifique soit-elle. Si la manifestation déroule un parcours chrono-thématique pertinent, elle n’est pas moins ternie par les défauts de la scénographie et de l’accrochage qui rendent la visite très inconfortable. Si certains soucis ont pu être corrigés quelques temps après l’ouverture de l’exposition (la taille de certains cartels illisibles a pu être augmentée selon la commissaire) d’autres demeurent, tels les caractères extrêmement fins et brillants que l’on retrouve sur les panneaux et qui rendent la lecture difficile. Le principal problème est qu’une part importante des cartels placés dans les vitrines ne sont pas placés aux côtés des œuvres qu’ils illustrent – mais plutôt aux côtés d’autres œuvres – ce qui fait que le visiteur aura souvent à chercher, parfois à l’autre bout d’une vitrine densément occupée, à quel objet correspond quel texte. Isabelle Bardiès-Fronty s’explique : « Les cartels [heureusement numérotés] ont été imprimés par le scénographe en amont sur les bandeaux tapissant les vitrines, mais pour des raisons esthétiques, la disposition des œuvres a été modifiée au moment du montage de l’exposition par le commissariat. » Lorsque plusieurs personnes sont rassemblées devant les vitrines – les espaces sont petits et le public nombreux –, il peut être particulièrement difficile d’apprécier une œuvre en même temps que sa médiation.

Dommage est le mot qui vient à l’esprit. Cette exposition avait tout pour être une parfaite réussite – le travail scientifique colossal sur laquelle elle repose est d’ailleurs parfaitement rendu dans l’excellent catalogue aussi fourni en essais que complet en notices d’œuvres, mais elle pâtit malheureusement de choix, qui n’ont finalement pas suffisamment pris en compte le confort  du public lors de la dernière ligne droite.

Note

(1) Exposition « Les Francs précurseurs de l’Europe », Musée du Petit Palais, 1997.

Les temps mérovingiens, trois siècles d’art et de culture (451-751)

Jusqu’au 13 février, Musée national du Moyen Âge, 6 place Paul Painlevé, 75005 Paris, www.musee-moyenage.fr, tous les jours sauf mardi 9h15-17h45, entrée 9 €. Catalogue éditions de la Réunion des musées nationaux, 286 p., 39 €

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°468 du 25 novembre 2016, avec le titre suivant : Des Mérovingiens pas assez mis en valeur

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