XVIIe SIÈCLE

« De semblables princes devraient ne point mourir »

Le Journal des Arts

Le 6 septembre 2017 - 495 mots

Le château de Blois revient sur la figure de Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII, en reconsidérant sa personnalité réelle et sa place dans l’histoire.

Blois. La dernière exposition consacrée à Gaston d’Orléans (1608-1660) datait des années 1960 : « C’est un prince mal aimé, trop longtemps présenté comme un prince faible, manipulé, prompt à assouvir ses passions », explique Élisabeth Latrémolière, commissaire de l’exposition et conservatrice en chef du château de Blois. Prenant appui sur des travaux récents d’historiens, l’exposition s’attache à réhabiliter Gaston, à travers 150 œuvres, archives, objets et documents. « Blois était l’endroit idéal : le château, reçu en apanage par Gaston, a été profondément modifié par le prince, jusqu’à sa mort ici même en 1660 », explique la commissaire. Héritier présomptif du trône de France jusqu’à ses 32 ans, Gaston d’Orléans jouit d’une place à part : entre tentatives de contrôle, exils et réconciliations, son frère Louis XIII, puis son neveu Louis XIV se méfient de ce prince très aimé du peuple. « Jamais règne ne fut plus doux, plus tranquille, ni plus heureux que l’a été le sien ; et, en vérité, de semblables princes devraient naître un peu plus souvent, ou ne point mourir » : Jean de la Fontaine aura peut-être écrit la plus belle épitaphe pour Gaston dans une lettre adressée à son épouse. L’oraison funèbre du prince, quant à elle, prononcée par un prêtre oratorien à ses funérailles, trop élogieuse, sera interdite de publication par Mazarin. Car le prince se rebelle très vite contre les actions centralisatrices engagées par Richelieu, puis Mazarin. En 1632, il prend les armes contre Richelieu qu’il accuse de mener des réformes tyranniques. Son rôle dans la Fronde et contre Mazarin divise encore : montré du doigt comme l’un des instigateurs des troubles contre Louis XIV, il a néanmoins joué un rôle de médiateur entre les nobles et le roi.

Érudit et collectionneur
Gaston d’Orléans est richissime : grâce à sa fortune, il collectionne les médailles, les livres, les objets scientifiques. Cependant, les historiens ont encore du mal à établir le périmètre de ses collections, car elles vont être léguées à Louis XIV par son oncle, intégrant les collections royales. Dans le parcours de l’exposition, un exceptionnel échantillon de trente-trois peintures sur vélins de grande dimension, prêt du Museum de Paris, œuvre de Nicolas Robert, figurent les fleurs, plantes et oiseaux qui peuplaient le jardin botanique du prince à Blois. Manuscrits enluminés du Moyen Âge, camées antiques, quelques pièces majeures sont présentées. Surtout, le prince se passionne pour les sciences. Il lit les ouvrages les plus récents de son époque, et son goût le pousse à correspondre avec certains scientifiques.

Sa mort, en 1660, correspond aux célébrations du Traité des Pyrénées. À Paris, les Te Deum de joie alternent avec les Requiem pour le défunt. Louis XIV, sorti grandi de cette paix avec l’Espagne, peut régner en maître. Le temps de la monarchie absolue, que Gaston a combattu toute sa vie, est venu, reléguant le prince à l’oubli.

Gaston d’Orléans, prince rebelle et mécène,
jusqu’au 15 octobre, château de Blois, 6 place du Château, 41000 Blois.
Légende Photo :
Gaston d'Orléans vêtu à la romaine et tenant le bâton de commandement, château de Versailles, Ecole française, photo : RMN (château de Versailles) / D.R.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°484 du 8 septembre 2017, avec le titre suivant : « De semblables princes devraient ne point mourir »

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