GRAPHISME

Dans les petits papiers

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 18 octobre 2018 - 496 mots

La maison d’art Bernard-Anthonioz présente en très grand nombre des objets imprimés : livres, cartes postales ou cartons d’invitation, tous œuvres de graphistes à manipuler….

Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne). On le sait depuis belle lurette : « Ce n’est pas la taille qui compte. » Le titre de cette exposition consacrée au graphisme ne manquera pas de faire sourire. Il exprime pourtant très précisément son contenu : « Un regard sur le graphisme contemporain d’objets imprimés de format ou de statut modestes ». En effet, l’activité de graphiste ne concerne pas uniquement,loin de là, la « glorieuse » affiche – standard (80 x 120 cm), « sucette » Decaux (120 x 176 cm), panneau publicitaire (4 x 3 m). Quantité d’autres créations sont plus discrètes dans leurs dimensions : cartes de visite, badges, marque-pages, tracts et autres flyers, invitations, cartes postales, catalogues, multiples d’artiste, etc. Ces travaux n’en satisfont pas moins à une intelligence, non seulement des formes, mais aussi des savoir-faire techniques et économiques. Quoique souvent éphémères, d’aucuns se font vecteurs d’une identité graphique. C’est ce qu’évoque à l’envi cette passionnante exposition déployée dans la Maison d’art Bernard-Anthonioz.

Sont ici réunies pas moins d’un millier de pièces notoires ou inédites, productions et auto-productions, concoctées par une centaine de graphistes internationaux. Ainsi Bureau Collective a-t-il conçu, pour un ébéniste suisse, des cartes de visite en… bois. Pour le chausseur bordelais Michard Ardillier, Benoît Cannaferina a proposé, lui, une carte de moyen format qui joue avec l’embossage sur papier, afin d’illustrer divers marquages de cuir. L’expérimentation est de mise tous azimuts.

Souvent, les contraintes économiques impliquent une habileté accrue. Ainsi, afin de produire à moindres frais un catalogue, Philippe Millot, pour les éditions Cent Pages, conçoit deux livres en un, avec une seule impression et une même reliure (17 x 14 cm) jusqu’à ce qu’un coup de massicot ne les sépare. Résultat : d’un côté, l’ouvrage Nouvelles en trois lignes de Félix Fénéon (17 x 11,5 cm) ; de l’autre, le propre catalogue de la maison d’édition (17 x 2,5 cm). Seul le secteur de la mode résiste à cette pression économique. Les invitations aux défilés de haute couture peuvent encore se permettre des impressions et/ou des façonnages de luxe. Ainsi, le duo M/M Paris imagine, pour une présentation Alexander McQueen, des invitations avec impression d’une gravure sur cuivre pour la collection femme et impression typographique au plomb pour la collection homme, toutes deux du plus bel effet. Celles-ci s’habillent d’un fragile papier de soie qui mentionne toutes les informations « logistiques ». Mieux, pour le défilé automne-hiver 2017 de la marque suédoise Acne Studios, l’invitation dorée à chaud est ensuite scrupuleusement, et néanmoins élégamment, découpée au laser.

Surprise rare : le visiteur peut manipuler les objets exposés. Chaque pièce se rapporte en effet à une boîte qui contient toutes les informations permettant de la contextualiser : sa raison d’être, son usage, les conditions dans lesquelles elle a été créée, son tirage… Bref, un complément indispensable pour rendre ces « objets imprimés de petite taille » identifiables, sinon plus visibles !

Ce n’est pas la taille qui compte,
jusqu’au 16 décembre, Maison d’art Bernard-Anthonioz, 16, rue Charles-VII, 94130 Nogent-sur-Marne.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°509 du 19 octobre 2018, avec le titre suivant : Dans les petits papiers

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