Art contemporain

Coup de cœur

Dans Les Balkans, le présent conditionné au passé

Institut des cultures d’Islam, Paris-18e - Jusqu’au 12 décembre 2022

Par Olympe Lemut · L'ŒIL

Le 27 septembre 2022 - 326 mots

Exposition Collective -  C’est un choix assumé de la commissaire Falma Fshazi : « Nous ne voulions pas définir les Balkans par la géographie, donc il n’y a pas de carte dans l’exposition. » Le parcours englobe donc autant les républiques de l’ex-Yougoslavie que de l’Albanie – Falma Fshazi est albanaise.

La première œuvre enfonce le clou, puisque Lana Čmajčanin superpose des cartes géographiques où les contours des Balkans se brouillent à l’infini. Ce qui relie l’Albanie aux pays yougoslaves, c’est le poids « des récits nationalistes et de l’héritage socialiste », notamment l’omniprésence des monuments officiels. Par la vidéo, la sculpture et la photographie, plusieurs artistes se demandent que faire de ces traces devenues encombrantes depuis la chute de l’URSS. Luiza Margan ajoute une touche plus personnelle : elle se met en scène en copiant les positions des personnages du Monument de la libération de Rijeka (Croatie, 1955 ), dont elle colle des images d’archives sur ses propres photographies. Les années 1990 et 2000 ont entraîné un boom immobilier aux résultats inégaux pour la conservation du patrimoine. Ainsi, Ledia Kostandini présente-t-elle deux séries de cartes postales d’Albanie, des années 1970, puis des années 2000 : l’héritage moderniste a disparu entre-temps. Dans cette reconstruction, le temps reste parfois suspendu, comme les murs de brique de Sarajevo que Šejla Kamerić a photographiés en zoomant sur les impacts de balles : la guerre n’est jamais évoquée frontalement. La mémoire architecturale irrigue le travail de Yane Cavloski, qui a rassemblé des archives de l’Institut d’urbanisme de Skopje détruit par un incendie (2017) : on y voit la reconstruction de la ville par un architecte japonais en 1964 après un tremblement de terre. Documents originaux brûlés et copies ou moulages créent des sculptures qui « vont au-delà du résidu », selon l’artiste. Pour le vidéaste Driant Zeneli, c’est la Bibliothèque nationale de Priština (Kosovo) qui incarne une histoire tourmentée, avec son architecture brutaliste désormais à l’abandon. Le passé des Balkans n’en finit pas de resurgir dans le paysage.

« Urban Text, cet espace nommé Balkans »,
Institut des cultures d’Islam, 19, rue Léon, Paris-18e, www.institut-cultures-islam.org

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°758 du 1 octobre 2022, avec le titre suivant : Dans Les Balkans, le présent conditionné au passé

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