Dans la mémoire de Sabine Moritz

La première exposition de Sabine Moritz dans une institution en France est particulièrement convaincante. Elle est représentée par les galeries Marian Goodman et Gagosian à Paris, et à Londres par Pilar Corrias. Cette enseigne est précieuse pour le prêt des œuvres détenues dans des collections privées comme les trois tableaux de 1992-1993 relatifs à la période où Sabine Moritz aborde son enfance en Allemagne de l’Est à travers la reconstitution de fragments d’intérieur de l’appartement familial. Réalisées de mémoire, sept ans après avoir émigré en Allemagne de l’Ouest en 1985, à l’âge de 16 ans, ces trois toiles figuratives aux aplats de couleurs marqués tranchent avec les natures mortes des décennies ultérieures aux contours flous et aux peintures abstraites apparues pour la première fois dans son travail en 2015 avec Himmel (Cieux). La dernière exposition de l’artiste chez Marian Goodman à Paris, en 2019, s’intitulait « Deeply Unaware » (« Profondément inconscient »). Et l’on repense à ce titre devant les peintures récentes de l’artiste qui se distinguent par les silhouettes fondues dans une composition abstraite, avec des couleurs intenses qui se chevauchent et qui, dans Dreamer Iévoquent Le Déjeuner sur l’herbe d’Édouard Manet.