Art contemporain

Paris-16e

Carol Rama et ses obsessions

Musée d’art moderne de la Ville de Paris Jusqu’au 12 juillet 2015

Par Florence Dauly · L'ŒIL

Le 12 mai 2015 - 312 mots

PARIS

« Une personne qui peint comme moi peut être libre, lesbienne ou putain, capable de dire des choses que d’autres femmes ne se seraient pas permis de dire, même pas en rêve. ».

Cette affirmation de Carol Rama répondant à une interview d’Andrea et Paolo Accornero vers 1986 pose d’emblée la question de sa situation bien particulière dans l’histoire de l’art. Née en 1918 à Turin, elle a évolué dans une Italie profondément conservatrice au sein d’une famille bourgeoise catholique. Refuser de se marier était alors une position difficilement soutenable. Peu importe, en autodidacte, Carol Rama couche sur des dessins ses convictions. Pour la première fois, le Musée d’art moderne de la Ville de Paris accueille sa rétrospective en provenance du MacBa. La commissaire Anne Dressen a souhaité créer un parcours non chronologique à la manière d’une anatomie fragmentée. Inlassablement, Carol Rama interroge le genre en l’effaçant, des premiers dessins où se mélangent serpents phalliques sortant de tous les orifices féminins à un escarpin abritant un phallus. Repoussant les normes de beauté et de sexualité, elle représente des corps crus offerts au visiteur. Masturbation, première œuvre de l’exposition, serait la première représentation connue d’un plaisir solitaire et tabou. Sa première exposition en 1945 à la Galerie Faber de Turin sera d’ailleurs censurée pour obscénité. Le travail de Carol Rama ne relève pourtant pas de l’obscénité ou de la pornographie, puisqu’il n’essaye pas d’exciter le regard. Les œuvres mélangées entre différentes périodes montrent plutôt la récurrence de thèmes et d’obsessions, l’artiste s’auto-cite régulièrement. Véritable journal intime de ses angoisses – les corps malades qu’elle peint après l’internement de sa mère, le destin avec la figure des Parques, beaucoup reprise, ou la récurrence des yeux vus comme des témoins – son travail est son exutoire. De collages en assemblages, de Figuration en Art concret, son travail évolue et fait sens quand on embrasse son ensemble.

« La Passion selon Carol Rama »

Musée d’art moderne de la Ville de Paris, 11, avenue du Président-Wilson, Paris-16e, www.mam.paris.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°680 du 1 juin 2015, avec le titre suivant : Carol Rama et ses obsessions

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