Cannibales et cubistes

Les avant-gardes féminines au Mexique

Le Journal des Arts

Le 1 mars 1997 - 357 mots

La Fondation La Caixa de Madrid présente la démarche de trois femmes artistes latino-américaines de la première moitié de ce siècle : Frida Kahlo, Amelia Pelàez et Tarsila do Amaral.

MADRID - Frida Kahlo, l’épouse de Diego Riviera, est la plus connue en Europe des trois femmes artistes exposées à la Fondation La Caixa. Ses tableaux sont influencés par l’art populaire, les cultures précolombiennes, la peinture mexicaine classique du XIXe siècle et les ex-votos. Los cuatro habitantes de México fait partie des œuvres les plus représentatives, ainsi que les nombreux portraits en pied, entourés des objets et symboles que Kahlo définit comme "sa croix" (buste/corset, béquilles, blessures), véritables ornements qui constituent une autobiographie cruelle. La Cubaine Amelia Peláez, après une période de remise en question au contact du Cubisme, comme en témoignent des œuvres telles que La Liebre et Las Barcas, retourne dans son pays. Elle y réinvente entièrement son propre langage pictural, qui se réfère depuis lors à l’architecture de La Havane. Adoptant pour la structure de composition un cloisonnisme tiré des grilles du XIXe siècle, elle transpose les enseignements cubistes dans un chromatisme inspiré des vitraux, des fleurs et des fruits tropicaux.

L’itinéraire de la Brésilienne Tarsila do Amaral est assez semblable. Elle reprend ce qu’elle a appris de Fernand Léger et le transpose dans les couleurs et les paysages de son pays. Comme lui, Amaral est attirée par la technique moder­ne et peint, en dehors des compositions florales et des paysages, des gares ferroviaires, des trains et des villes mo­dernes, com­me dans São Pau­lo ou Estrada de Ferro. Alors que les avant-gardes parisiennes commencent à assimiler l’art africain, pour Amaral, la culture noire est surtout celle de son pays. Une peinture comme A negra anticipe l’atmosphère onirique qui caractérise sa période dite "cannibaliste", représentée dans l’exposition par des œuvres telles qu’Urutú, Abaporú, et Compo­sição. "Nous avalons la culture européenne, nous la digérons et en faisons une autre création, différente", semble être le message de ces scènes d’anthropophagie.

FRIDA KAHLO, AMELIA PELÀEZ, TARSILA DO AMARAL, jusqu’au 27 avril, Fondation La Caixa, Calle Serrano 60, Madrid, tél. 1 435 4833, tlj sauf mardi 11h-18h, dimanche 11h-14h30.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°34 du 1 mars 1997, avec le titre suivant : Cannibales et cubistes

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