Brussel-Parijs, retour réussi

Les expositions satellites prennent leur pleine ampleur

Le Journal des Arts

Le 10 octobre 1997 - 606 mots

Après l’échec relatif de la saison France-Belgique à Paris, la récolte s’annonce meilleure en Belgique. Exposition élargie pour déborder le sujet à Charleroi, complétée et augmentée pour Verhaeren à Bruxelles. Reste Gand, où \"Paris-Bruxelles\" résonne comme une humiliation légitime pour les Francophones, incapables de mener à bien ce projet qui était le leur à l’origine.

GAND-CHARLEROI-BRUXELLES (de notre correspondant).Tout commence sur le quai de gare de Paris-Nord, où un kiosque vante les charmes touristiques d’une Flandre qui ne précise plus qu’en minuscule son appartenance à la Belgique. L’annonce est claire : la station belge de Paris-Bruxelles témoignera de l’ancrage flamand d’une capitale qui reste culturellement ce qu’elle était à la fin de siècle, une ville francophone. L’opération relève d’une logique politique dont les seuls responsables sont les Francophones, qui ont fait preuve dans l’organisation de la manifestation d’une incurie et d’une incompétence aujourd’hui éclatantes.

Le laboratoire de l’œuvre
Trois cent kilomètres plus loin, la vaste exposition présentée au printemps dernier au Grand Palais vient terminer ses jours dans les salles entièrement rénovées du Musée de Gand. Aucun changement profond n’a été apporté : “Paris-Bruxelles” reste placée sous le signe d’un long panorama relativement superficiel et sans ligne de conduite affirmée. Les arts décoratifs, particulièrement mal servis à Paris, trouvent à peine une meilleure scénographie. Si la mise en espace s’est sensiblement améliorée – pourquoi tout présenter au kilomètre ? –,  que dire des éclairages qui ne tirent aucun parti de la féerie des verres de Gallé ou du Val-Saint-Lambert ? Dans cette saison France-Belgique, l’intérêt ne réside pas dans l’exposition centrale, mais dans la reprise de deux expositions qui, déjà à Paris, se distinguaient par leur qualité. À Bruxelles, au Musée Charlier, l’exposition “Émile Verhaeren, un musée imaginaire” a troqué les oripeaux d’une exposition-dossier d’Orsay pour offrir en quelque deux cents pièces la diversité d’approche de l’univers imaginaire de Verhaeren. Dans l’hôtel particulier de Gustave Charlier, les œuvres – certaines, comme cette esquisse de La Défiance de Khnopff, ont rarement été montrées – prennent une dimension intimiste. L’esprit d’une époque se déploie ainsi de salon en salon, au grand plaisir du visiteur. À Charleroi, “Rodin et la Belgique” est devenu le prétexte à l’organisation d’une véritable rétrospective. Saluons ici une scénographie exemplaire, d’une qualité et d’une intelligence rarement égalées. Tout en conservant les points d’ancrage d’une relation Paris-Bruxelles qui faisaient la qualité de l’exposition du Musée Rodin, Laurent Busine a organisé sa présentation en offrant autant de fenêtres sur l’œuvre du sculpteur : le Victor Hugo, le Balzac, le Penseur, la Porte de l’Enfer sont présents, souvent en plusieurs exemplaires pour permettre au visiteur de pénétrer plus avant dans le laboratoire d’une œuvre qui échappe aux relations bilatérales, trop souvent réduites à l’inventaire des influences. Gand, Bruxelles, Charleroi reconstituent ainsi – bien involontairement – le panorama d’une Belgique artistique et littéraire qui a résisté aux enjeux politiques et aux querelles communautaires. Si l’axe Paris-Bruxelles apparaît bien majeur dans l’histoire de l’art de la fin du siècle passé, il n’est pas exclusif. Londres, Vienne, Berlin ont eu leur mot à dire. Espérons qu’il sera un jour entendu.

PARIS-BRUXELLES BRUSSEL-PARIJS, jusqu’au 14 décembre, Museum voor Schone Kunsten, Citadellpark, Gand, tél. 32 9 222 54 63, tlj sauf lundi 10-18h, mercredi 10h-21h. Entrée de 280 à 100 FB.
RODIN ET LA BELGIQUE, jusqu’au 14 décembre, Palais des Beaux-Arts, place du Manège, Charleroi, tél. 32 71 30 15 97, tlj sauf lundi 10-18h. Entrée de 220 à 100 FB.
ÉMILE VERHAEREN : UN MUSÉE IMAGINAIRE, jusqu’au 30 novembre, Musée Charlier, 16 avenue des Arts, Bruxelles. tél. 32 2 218 53 82, tlj sauf lundi 10-18h. Entrée de 220 à 100 FB.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°45 du 10 octobre 1997, avec le titre suivant : Brussel-Parijs, retour réussi

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