Dessin

Beautés françaises

Le Journal des Arts

Le 11 décembre 2007 - 722 mots

Le Louvre accueille une belle sélection de feuilles du XVIe au XVIIIe siècle d’artistes français issues de la collection du Hessisches Landesmuseum à Darmstadt.

PARIS - Le Musée du Louvre expose actuellement soixante-quatre dessins français provenant du Musée de Darmstadt, en Allemagne. Soient trois salles et des œuvres de grande qualité pour une petite anthologie du dessin français du XVIe au XVIIIe siècle.
Le cabinet des dessins du Hessisches Landesmuseum à Darmstadt répertorie plus de huit mille feuilles de toutes les écoles. Composée de près de cinq cents œuvres, sa collection de dessins français des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles est l’une des meilleures conservées dans le pays. À l’origine de cette richesse, le cabinet constitué par Louis Ier, grand-duc de Hesse, seigneur de l’un de ces petits États qui ne disposaient pas de ressources suffisantes pour créer des fonds de peinture. Mais la personnalité qui donna sa véritable impulsion à la collection est celle du duc de Dalberg. Fils d’un amateur d’art, homme d’affaires, le duc de Dalberg mit à profit ses séjours à Paris pour se constituer entre 1803 et 1812 une collection de dessins. Des ventes aux enchères lui permettent alors de mettre la main sur des pièces issues d’ensembles prestigieux, à l’instar de celui provenant du marquis de Lagoy. En 1812, Dalberg cède au grand-duc de Hesse, en paiement de redevances, mille quatre cents œuvres parmi lesquelles plus de trois cent trente dessins français. Cette transaction est une aubaine pour un Louis Ier souhaitant se constituer une collection en dépit de moyens financiers limités. Le fonds de Darmstadt gardera l’empreinte du duc de Dalberg, dont proviennent la plupart des feuilles aujourd’hui présentées au Louvre.

Leçon d’histoire de l’art
Transparaît dans les choix du duc une volonté didactique et exhaustive plus caractéristique d’une collection publique que d’un fonds d’amateur. Constituée plutôt à partir d’achats de groupes d’œuvres importants qu’à la suite d’une recherche minutieuse et passionnée, la sélection s’apparente à une leçon d’histoire de l’art, dans laquelle les œuvres choisies possèdent une dimension exemplaire. La présentation chronologique des dessins proposée au Louvre s’articule en trois temps. Elle s’ouvre sur le milieu du XVIe siècle, alors que les artistes français regardent vers l’Italie et s’inspirent des œuvres de Rosso Fiorentino et de Primatice. Cette période est illustrée par un très beau dessin de Jean Cousin le Père, La Vierge, saint Jean et sainte Marie-Madeleine au pied du Calvaire.
La seconde école de Fontainebleau opère ensuite au début du XVIIe siècle une révision du style influencé par l’Italie. Elle est représentée par Claude Vignon ou Martin Fréminet. Quelques décennies plus tard, la France connaît une époque de plus grande stabilité politique et la forte demande de décors pour les édifices religieux et les riches demeures modifient le métier de peintre. Simon Vouet, Eustache Le Sueur ou Laurent de La Hyre développent une grande peinture lyrique. Le dessin joue alors un rôle essentiel pour composer des histoires complexes et monumentales. Il intervient en outre de manière notable dans l’organisation du travail d’équipes réunissant des collaborateurs devenus nombreux. Parmi les clous de cette section, citons le dessin Satyres observant l’anamorphose d’un éléphant, de Vouet. Certains artistes rompent avec le traitement classique de sujets tels que le paysage. Adam Frans Van der Meulen est de ceux-là, et son immense Vue de Dinant sur la Meuse à la pierre noire et à la plume est une merveille du genre. Entre la fin du XVIIe siècle et le début du XVIIIe, entre Charles Le Brun et François Boucher, un changement se fait inexorablement jour en France. Les peintres s’intéressent désormais à l’art de Venise et des Pays-Bas plus volontiers qu’à celui de Rome ou de Bologne. Une dimension ludique et légère imprègne les œuvres. Cette facette est particulièrement bien représentée par trois études de groupes de comédiens de Jean-Antoine Watteau, véritables délices de souplesse et de précision du trait.
Pour les visiteurs encore avides de dessins à l’issue de ce parcours édifiant, le Louvre propose (simultanément et jusqu’au 28 janvier) une large sélection de sa collection de dessins de Polidoro da Carravaggio, l’une des plus belles au monde.

TROIS SIÈCLES DE DESSINS FRANÇAIS DU MUSÉE DE DARMSTADT

Jusqu’au 14 janvier, Musée du Louvre, aile Sully, 75001 Paris, tél. 01 40 20 53 17, www.louvre.fr, tlj sauf mardi 9h-18h, jusqu’à 22h mercredi et vendredi. Catalogue, éd. Gradenigo-Gourcuff, 573 p., 89 euros, ISBN 978-2-35340-026-3. Et aussi POLIDORO DA CARRAVAGIO, jusqu’au 28 janvier, aile Denon.

DESSINS FRANÇAIS DU MUSÉE DE DARMSTADT

- Commissaires de l’exposition : Dominique Cordellier, conservateur en chef du département des Arts graphiques au Musée du Louvre ; Federica Mancini, chargée d’exposition au Musée du Louvre - Nombre d’œuvres : 63

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°271 du 14 décembre 2007, avec le titre suivant : Beautés françaises

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