Architectures érotiques

Le Musée des années 30 dévoile les nus érotiques de Marcel Gromaire

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 18 janvier 2011 - 358 mots

BOULOGNE-BILLANCOURT - À la question posée par le cinéaste François Reichenbach sur la nature de son métier, Marcel Gromaire (1892-1971) répond : « J’ai pour habitude de peindre. »

Dans ce film documentaire surprenant tourné en 1967, le ton est courtois mais flegmatique, le costume est tiré à quatre épingles, l’atelier de la Villa Seurat dans le 14e arrondissement de Paris est aussi soigné que le bureau du président d’une multinationale. Pendant les onze minutes que dure le film diffusé dans les salles du Musée des années 1930, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), l’artiste peste contre l’humilité que lui inspire son travail, mais il sait rester détaché et tranchant. Il dit, par exemple, avoir pressenti « le danger » du cubisme, trop décoratif à son goût, et déplore que le dessin soit sacrifié sur l’autel de l’art contemporain.

Figuratif, Marcel Gromaire l’est toujours resté, ce malgré son traitement géométrique des sujets, à la périphérie de l’abstraction. Ce sentiment est particulièrement prégnant dans cette première exposition consacrée aux nus érotiques de l’artiste. Au fil d’un accrochage cartésien (les femmes dénudées y sont regroupées selon qu’elles sont assises, couchées, debout, de dos…) dont le ton étonnement suranné sied malgré tout au personnage, les corps se déploient, se contorsionnent, s’enchevêtrent avec eux-mêmes dans l’univers feutré de l’atelier. Souvent représentée devant la tour Eiffel, la femme est une cathédrale, une structure architecturale que Gromaire érotise. Était-il vraiment nécessaire de conclure le parcours sur les nus de contemporains de l’artiste ? Ils ne font que mettre en valeur la sélection qui, à quelques exceptions près, se partage entre les collections du Musée d’art moderne de la Ville de Paris (grâce au legs Maurice Girardin, mécène de l’artiste) et celles de la Galerie de la Présidence. Une belle opération pour la galerie parisienne qui s’affirme en spécialiste de l’œuvre de Gromaire tout en dévoilant une belle partie de son stock ! 

NUS EN QUÊTE D’IDÉAL : L’ÉROTISME DE MARCEL GROMAIRE (1892-1971)

Jusqu’au 20 février, Musée des années 30, 28, avenue André-Morizet, 92100 Boulogne-Billancourt, tél. 01 55 18 53 00, www.boulognebillancourt.fr, tlj sauf lundi 11h-18h. Catalogue, coédité par le musée et Somogy, 128 p., 28 euros, ISBN 978-2-7572-0418-4

MARCEL GROMAIRE

Commissaire : Frédéric Chappey, directeur des musées de la Ville de Boulogne-Billancourt

Mécénat : Neuflize OBC

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°339 du 21 janvier 2011, avec le titre suivant : Architectures érotiques

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