Anna, Eugène et les Boch

La Faïencerie influencée par les enfants du fondateur

Le Journal des Arts

Le 17 novembre 2000 - 483 mots

La Louvière a longtemps rimé avec Faïencerie Kéramis. Fondées par Victor Boch, les usines ont constitué un foyer vital d’industrialisation consacrant les Boch comme une famille emblématique de la nouvelle bourgeoisie industrielle qui s’était constituée au XIXe siècle. À travers Eugène, le fils, et Anna, la fille du fondateur, deux expositions font revivre l’âme d’une région et les couleurs d’une époque révolue.

LA LOUVIÈRE (de notre correspondant) - Peintre et poète, Eugène Boch reste aujourd’hui célèbre pour le portrait étoilé que Van Gogh réalisa de lui. À partir de son œuvre, le Musée Ianchelevici propose une lecture du paysage urbain tel qu’il a pu être ou tel qu’il est encore vécu par une trentaine d’artistes tous attachés au Hainaut. D’Eugène Boch à Daniel Fauville, le regard porté sur l’univers industriel évolue de l’observation analytique – et bientôt photographique – au constat désenchanté mais néanmoins ludique tandis que les usines, désormais obsolètes, marquent le paysage de leur mémoire souvent douloureuse.

Rien de comparable chez Anna Boch. La vision sociale ne constitue pas l’élément majeur de l’œuvre de l’unique femme qui participera à l’aventure du cercle des Vingt, animé par son cousin Octave Maus. Collectionneuse avisée, on lui doit l’essentiel des achats audacieux auprès des Vingt à commencer par les célèbres Vignes rouges de Van Gogh. Si Anna Boch a un œil, si elle appartient au réseau progressiste qui, à Bruxelles, fédère l’avant-garde de la fin de siècle, il n’en va pas de même de sa peinture. Dilettante, elle pratique un Impressionnisme très vite rattrapé par les conventions bourgeoises. Ses toiles mâtinées de pointillisme – elle a acheté une étude de la Grande Jatte de Seurat – sont plaisantes sans rien revendiquer de cet esprit révolutionnaire qu’elle apprécie, et qu’elle achète, chez Gauguin, Van Gogh ou Seurat. Mieux, elle semble s’amuser à en reprendre les innovations pour les transposer dans le champ d’une peinture bourgeoise. Sensible et cultivée, Anna Boch jouera un rôle non négligeable dans l’histoire des Faïenceries Boch. Profitant de ses contacts sur la scène bruxelloise, elle introduira dans les ateliers des créateurs comme Willy Finch qui y trouveront le terrain à une application industrielle de leurs recherches décoratives. L’intérêt manifesté par Anna Boch pour l’Art nouveau ira dans le même sens : assurer à l’industrie moderne un supplément d’âme qui adjoindrait au principe de quantité celui de qualité. Bien accrochée et servie par un catalogue limpide, l’exposition rend compte des facettes de cette personnalité multiple qui contribua largement à faire des Vingt un carrefour de l’Europe artistique de la fin de siècle.

- ANNA BOCH, jusqu’au 17 décembre, Musée royal de Mariemont, Chaussée de Mariemont 100, 7100 La Louvière, (tlj sauf lundi 10h-18h) Tél. 32 (0)64 21 21 93
- Visions du Hainaut industriel d’EugÈne Boch À la photographie, Musée Ianchelevici, place communale 21, 7100 La Louvière, du mardi au vendredi, 14h-17h, samedi et dimanche, 14h-18h. Tél. 32 (0)64 28 25 30

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°115 du 17 novembre 2000, avec le titre suivant : Anna, Eugène et les Boch

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