Insomnie

Paris revit la nuit

Par Anaïd Demir · Le Journal des Arts

Le 6 octobre 2006 - 730 mots

Pour sa cinquième édition, la « Nuit Blanche » poursuit son expansion
et explore de nouveaux quartiers de la capitale.

PARIS - Somnambules, insomniaques et amateurs d’art ont rendez-vous sous la voûte étoilée pour la cinquième édition de « Nuit Blanche ». Entre 19 heures et 7 heures du matin, dans la nuit du 7 au 8 octobre, les artistes mèneront la danse et quadrilleront Paris. Du nord au sud, d’est en ouest, six quartiers s’illumineront : Beaugrenelle, les Champs-Élysées, la Goutte d’Or, le Marais, Bercy-Tolbiac et Carpentier.
Les anciens codirecteurs du Palais de Tokyo, Jérôme Sans et Nicolas Bourriaud, ont pris les commandes de ces festivités. L’effervescence artistique parisienne se lira plus que jamais dans cet événement gratuit qui s’adresse au plus grand nombre. À côté des galeries d’art et des musées, les lieux de culte, les gymnases, les façades d’immeuble… seront de façon éphémère voués à l’art. L’occasion de se réapproprier la ville, de débusquer de jeunes talents mais aussi de redécouvrir le patrimoine.

Ébullition artistique
Ainsi, la place de la Concorde sera plongée dans une drôle d’atmosphère. Elle baignera entièrement dans le bleu d’Yves Klein, féerie spirituelle de l’IKB (International Klein Blue). Sous ses allures de cerveau, le Petit Palais se mettra à scintiller de manière aléatoire grâce aux effets imaginés par Carsten Höller. Devant le Grand Palais, une montagne étincelante de bonbons dans leur emballage d’argent s’offrira au public : il s’agit de Placebo, une œuvre perpétuellement vouée à disparaître et que l’on doit au défunt Felix Gonzalez-Torres.
Sur la dalle de Beaugrenelle, un film de Warhol datant de 1964 nous propulsera à New York, huit heures durant et en plan fixe, sur le toit de l’Empire State Building.
De l’autre côté de la ville, la Goutte d’Or concentre une grande énergie artistique. La halle Pajol, ancienne friche ferroviaire, accueillera Le Grand Mix, une collaboration entre l’affichiste Jacques Villeglé et le pape de la musique électronique Pierre Henry. Toujours dans la halle, alors qu’Ann Veronica Janssens nous hynotisera avec ses cercles lumineux et que Anthony McCall créera des architectures lumineuses, Kader Attia nous fera perdre nos repères, dans la pénombre. Olaf Breuning revisitera, lui, le cinéma muet à travers son nouveau film, une œuvre en noir et blanc aussi désuète que comique. Rue Laghouat, Franck Scurti installera ses étranges devantures de magasins, tandis qu’Édouard Levé peuplera les vitrines de la rue des Gardes de scènes intimes et fantasmées. Subodh Gupta recomposera un crâne avec des ustensiles de cuisine dans l’église Saint-Bernard. Au Lavoir Moderne, Laurent Grasso sèmera la confusion entre jour et nuit et son aventure se poursuivra sur le terrain de rugby du quartier Carpentier (13e) avec une œuvre intitulée Éclipse.
Toujours dans le 13e arrondissement, la Bibliothèque nationale de France sera restructurée par les faisceaux lumineux orchestrés par Thierry Dreyfus, et l’édifice de la Caisse des dépôts et consignations se jouera des variations colorées de James Turrell en bord de Seine. Dans la toute nouvelle piscine Joséphine Baker, le visiteur « plongera » dans le concert subaquatique donné par Michel Redolfi. Dans les jardins de Bercy, des lèvres « chefs-d’orchestre » entraîneront le public dans un karaoké amoureux signé Camille Henrot, alors qu’une série de chats somnambules de Séchas hanteront les lieux. Avec Nicolas Moulin, la célèbre rue Watt deviendra un terrain de science-fiction à explorer.
Plus que jamais dynamique avec sa concentration de galeries d’art, le Marais réserve un grand nombre de surprises. Xavier Veilhan y sera présent en deux lieux : à l’Hôtel de Ville, où ses mobiles aux allures cosmiques s’animeront au son des mélodies de Sébastien Tellier ; et dans le jardin des Tuileries, où son anneau de vitesse attendra ses patineurs sur glace. Du côté spirituel, les cierges de Carlos Garaïcoa reconstitueront une ville et nous convieront à l’introspection dans Notre Dame des Blancs-Manteaux. À l’église Saint-Eustache, Philippe Perrin nous réunit autour d’une couronne d’épines géante que les mélodies d’Olivier Mellano rendront inquiétante. Au Châtelet, Kimsooja mêlera sa respiration à des monochromes vidéo et Tania Mouraud, au Musée de la chasse et de la nature, nous fera partager la vie colorée des carpes.
La Nuit Blanche sort aussi des frontières de Paris et gagne la banlieue. Elle a également inspiré de grandes villes à l’étranger. En septembre, plus de deux millions et demi de personnes ont participé à celle de Rome !

Nuit Blanche 2006, le 7 octobre, Paris, www.nb2006.paris.fr

Versailles à l’envers

Pour la troisième année consécutive, Laurent Le Bon, conservateur au Centre Pompidou, fait son off à Versailles. Les 7 et 8 octobre, il accueille Shigeru Ban, Michel Blazy, Thierry Dreyfus, Francis Kurkdjian, Christian Lacroix, Ange Leccia, Natacha Lesueur, Benjamin Morando, Les Radi Designers, Felice Varini et Gérard Vié. Un programme royal ! Rens. www.chateauversailles.fr

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°244 du 6 octobre 2006, avec le titre suivant : Paris revit la nuit

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