Art contemporain

Gaëlle Choisne

Par Anne-Cécile Sanchez · L'ŒIL

Le 8 avril 2021 - 496 mots

Gaëlle Choisne a le vent en poupe. Lauréate du prix Aware 2021 récompensant une artiste femme émergente, elle était en octobre dernier à l’affiche de la Nuit blanche 2020, entame une résidence de deux mois à la Fondation Lafayette Anticipations et enchaînera avec une exposition au Musée Pera à Istanbul… « Depuis la sortie des Beaux-Arts [de Lyon], je n’ai pas arrêté », confie-t-elle.

En effet, de La Havane à Sharjah, ses installations de sculptures ont bénéficié d’une forte visibilité dans les biennales, jusqu’à celle de Lyon, où l’on pouvait découvrir, sous une sorte de serre, dressés comme des stèles et baignant dans de petits bassins d’eau alimentés électriquement, ses panneaux imprimés de reproductions de plantes. De grandes draperies de velours, des « tableaux » composés de rebuts, d’emballages, de coquillages et de céramiques complétaient le dispositif, qu’accompagnait la projection d’un film mixant extraits de documentaires sur Haïti et passages des Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes.

Une instabilité créative

Les thèmes abordés par la trentenaire entrent en résonance avec l’époque : post-colonialisme, créolisation, féminisme, chamanisme…, tout en mélangeant images et sculptures, art et littérature, et en affirmant un goût prononcé pour la subversion des formes. Dans l’« Entrée des artistes » de la Galerie Air de Paris, 32 fruits engravés au laser citent ainsi dans le désordre un poème d’Audre Lorde : une œuvre de dimensions variables dont le protocole, comme un plat du jour, varie selon l’arrivage et la saison, et dont la conservation s’avère de nature fragile (Eat Me Softly – If You Come Softly, 2021). Son rapporteur pour le prix Aware, le commissaire indépendant Thomas Conchou, convoque d’ailleurs au sujet de la plasticienne le principe d’une « instabilité créative », « dans laquelle […] l’affirmation d’une pratique de la multiplicité, de l’hybridation, permet la production de nouvelles narrations encapacitantes [sic] qui nourrissent les identités hétérogènes et mouvantes des sujets postcoloniaux ».

Récemment, Gaëlle Choisne est plus classiquement venue à la peinture, qu’elle a choisi d’apprivoiser en réalisant, d’abord, des toiles de petit format, à l’acrylique. « C’était comme un jeu, je ne pensais pas les montrer, explique-t-elle. Et puis j’ai commencé à réfléchir à des cadres, et je me suis retrouvée en train de concevoir des dispositifs sculpturaux… pour montrer mes peintures. » On pourra en voir quelques-unes dans le solo-show que lui consacre fin mai la Galerie Air de Paris. Intitulé « Mondes subtiles », en référence aux rituels mystiques, il prend le parti d’un genre féminin à rebours de l’orthographe. « J’ai envie de changer les règles », résume l’artiste, dont le propos engagé n’est cependant pas dépourvu de douceur. Prônant l’amour comme une solution de résistance (Temple of Love, 2018), elle veut y voir « une réponse politique ». Et rêve d’inventer « une relation au monde plus saine, plus humaine, plus vivante. » Acceptons-en l’augure.

 

1985
Naissance à Cherbourg (50)
2015
Biennale internationale de La Havane (Cuba)
2017
Biennale de Sharjah (EAU)
2018
« Temple of Love » , exposition à Bétonsalon, centre d’art
2021
Lauréate du prix Aware. L’artiste est représentée par la Galerie Air de Paris

Thématiques

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°743 du 1 avril 2021, avec le titre suivant : Gaëlle Choisne

Tous les articles dans Création

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque