Des illustrations très timbrées

Une spirale de galets blancs, un bosquet vert en forme de cœur, un cercle de cailloux dans le sable, une arche rocheuse… Le 8 janvier, La Poste sort un nouveau carnet de douze timbres dédiés au Land Art, cette « tendance de l’art contemporain utilisant le cadre et les matériaux de la nature ». Mais à quoi correspondent les « œuvres » qui illustrent cette thématique ? Aucun titre, aucun nom n’accompagne ces images. Le bosquet vu d’avion semble une version kitsch de la Groene Kathedraal du Néerlandais Marinus Boezem (1987), le vortex de galets évoque vaguement la Spiral Jetty réalisée par le sculpteur américain Robert Smithson au bord du Grand Lac Salé (1970), la voûte minérale reprend le principe des Striding Arches (1999) autoportantes d’Andy Goldsworthy, dressées sur les collines écossaises. Au-delà de l’absurdité que constitue la reproduction au format vignette d’œuvres souvent monumentales conçues en harmonie avec leur environnement, on peut s’interroger sur cette récupération d’un concept et de ses réalisations iconiques. Une intelligence artificielle incontrôlable peu portée sur le respect du droit d’auteur aurait-elle pris les commandes du programme philatélique de La Poste ? Ces timbres d’usage sont édités à 3 500 000 exemplaires. Ils n’ont donc a priori aucune valeur pour le collectionneur. Sauf à ce que parmi eux se glisse une nouvelle aberration. Début novembre, un timbre américain a ainsi atteint aux enchères le prix record de deux millions de dollars. Il s’agissait d’un rare et précieux exemplaire de la série des « Inverted Jenny » : cent timbres, datant de 1918, imprimés par inadvertance à l’envers et devenus des trésors, chéris par les amateurs de philatélie.