Politique culturelle

Réforme du ministère, les occasions ratées

Le rapport est resté comme tant d’autres sur une étagère de la Rue de Valois.

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 31 mars 2009 - 962 mots

Remis en 1996 par Jacques Rigaud à Philippe Douste-Blazy, alors ministre de la Culture, et intitulé « Pour une refondation de la politique culturelle », le projet de rénovation du ministère de la Culture, censé l’adapter à ses nouvelles fonctions – décentralisation, développement des industries culturelles – aura été vite enterré.

Quinze ans plus tard, c’est donc à l’aune des impératifs de la révision générale des politiques publiques (RGPP), lancée en décembre 2007 comme une vaste entreprise de modernisation, que le ministère sera transformé. Dirigé par un inspecteur des Finances, un audit passe au crible l’organisation des services et envisage les changements, calculatrice à la main. Le ministère sera mis au régime sec, ses dix directions seront réduites à trois. Les protestations des syndicats, inquiets pour les conséquences en termes de suppressions d’emplois, n’y changeront rien.

Au sein de ce vaste mouvement, aucune stratégie ne semble pourtant identifiable. Quel sera désormais le rôle du ministère de la Culture, alors que la décentralisation et la baisse des crédits ont incité les collectivités locales à investir davantage dans le domaine culturel ? La Rue de Valois, dont le budget stagne, peine à donner un cap. Les ministres se succèdent sans convaincre. Leurs arbitrages ne parviennent pas à clarifier le rôle de la tutelle face à des établissements publics de plus en plus autonomes, incités à développer leurs ressources propres, et dont certains deviennent de véritables États culturels dans l’État. Plusieurs secteurs (patrimoine, musées, écoles d’enseignement supérieur) sont affectés directement par la baisse des crédits. La culture n’est plus à la fête. Preuve en est : l’extrême discrétion d’un ministère de la Culture qui fête ses 50 ans en 2009 sans effervescence.

À la Culture
1995|Philippe Douste-Blazy
1997|Catherine Trautmann
2000|Catherine Tasca, avec Michel Duffour secrétaire d’État au patrimoine et à la décentralisation
2002|Jean-Jacques Aillagon
2004|Renaud Donnedieu de Vabres
2007|Christine Albanel

Récolement
1996|Paris
Plus de 180 000 œuvres dont il faut vérifier la présence physique… La commission de récolement des dépôts d’œuvres d’art se lance dans une entreprise titanesque, un an après sa création. Fin 2007, un tiers de la tâche reste à accomplir.

Œuvres spoliées
1996|Paris
La direction des Musées de France crée un catalogue en ligne des œuvres d’art volées par les nazis, dites « Musées Nationaux Récupération ».

Crise à la RMN
1997-2005|Paris
Il aura fallu près de dix ans à la Réunion des musées nationaux (RMN) pour sortir de la crise. Épinglée pour sa mauvaise gestion, l’institution mutualiste des musées nationaux, créée en 1895, aura failli disparaître.

Création du FRAME
1999|Dallas
(Texas) Plusieurs musées américains s’associent à des musées régionaux français pour créer « FRAME » (French Regional & American Museum Exchange), une structure instaurant des partenariats durables.

Les arts à l’école
2000|Paris
Plan Lang-Tasca pour les arts et la culture à l’école (2000), plan de relance de l’éducation artistique et culturelle (2005), circulaire interministérielle sur le développement de l’éducation artistique et culturelle (2008)… Après la suppression des classes à PAC (projet artistique et culturel), les deux derniers plans en date voient s’éloigner toute chance de parvenir à des résultats concrets.

La diversité culturelle à l’Unesco
2001|Paris
« Héritage commun de l’humanité ». Le 2 novembre, l’Unesco reconnaît la diversité culturelle et considère sa sauvegarde comme un impératif concret et éthique inséparable du respect de la dignité humaine.

INHA : Atermoiements d’un grand pôle d’histoire de l’art
2001|Paris
Imaginé dès 1973 par l’historien de l’art Jacques Thuillier, soutenu en 1983 par André Chastel, l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) a vu le jour le 12 juillet. Installé sur le site historique de Bibliothèque nationale de France, il attend toujours de grands travaux.

De nouveaux acteurs : les collectivités locales
2002|Paris
La dernière étude du ministère de la Culture l’atteste : les Villes sont devenues ses principaux bailleurs de fonds, en consacrant à la culture en moyenne 9 % de leur budget pour les villes de plus de 10 000 habitants, et plus de 15 % pour les métropoles de plus de 100 000 habitants.

Une loi pour les musées
2002|Paris
Label « Musée de France », confirmation de l’inaliénabilité des collections, démocratisation culturelle, dispositions fiscales relatives aux « trésors nationaux »… Le 4 janvier, la loi relative aux musées de France est promulguée après huit années de gestation.

Paris essaime en régions
2003|Paris
Le Centre Pompidou et le Louvre, incités par la Rue de Valois, annoncent leur intention d’ouvrir une antenne respectivement à Metz (Moselle) et Lens (Pas-de-Calais, grâce au soutien financier des collectivités locales.

Le mécénat à l’honneur
2003|Paris
Levant plusieurs blocages du texte de 1987, la nouvelle loi relative au mécénat, aux associations et aux fondations est entrée en vigueur le 1er août. Elle favorise principalement le mécénat d’entreprise.

Lille, en attendant Marseille
2004|Lille
Faute d’avoir obtenu les Jeux olympiques, la capitale nordiste honore le titre de « Capitale européenne de la culture » avec 9 millions de participants et dix ans de notoriété gagnée. À Marseille désormais de faire aussi bien en 2013.

Pour une Europe de la culture
2005|Paris
Réunis à Paris, 14 ministres signent la « Charte pour l’Europe de la culture », qui affirme la protection de la richesse de la diversité culturelle et linguistique en tant qu’objectif fondamental.

Louvre-Abou Dhabi
2007| Abou Dhabi (Émirats arabes unis)
Un milliard d’euros. C’est la somme que l’émirat d’Abou Dhabi a accepté de verser à la France selon un accord daté du 6 mars. Celui-ci prévoit la construction d’un musée conçu par Jean Nouvel et portant le nom du « Louvre ». Ouverture prévue en 2013.

Scène française
2008|Paris
La ministre de la Culture, Christine Albanel, commande à Olivier Kaeppelin un rapport sur l’aménagement du sous-sol du Palais de Tokyo. Après « La force de l’art », la visibilité de la scène française est enfin au cœur du débat.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°300 du 3 avril 2009, avec le titre suivant : Réforme du ministère, les occasions ratées

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