Dépenses

Les principaux postes et leurs coûts

Le Journal des Arts

Le 10 mars 2015 - 1002 mots

Dans un budget d’exposition, les coûts varient en fonction des stratégies adoptées relativement aux ambitions des institutions comme à leur échelle et à leur statut.

Organiser une exposition est une affaire au long cours, qui présuppose un travail en amont de deux ans au minimum pour les différents acteurs de l’événement. Penser, concevoir, réaliser, assurer, transporter, mettre au point la scénographie, communiquer, conserver, sécuriser : autant d’étapes qui engendrent des frais.

Penser l’exposition en termes de coûts a bien évidemment ses limites, mais envisager les différents postes de dépenses dans l’organisation d’une exposition permet de mieux comprendre les euros investis dans telle ou telle exposition. À titre d’exemple, une exposition présentée au Louvre ou au Musée d’Orsay coûte en moyenne 1,5 million d’euros, tandis que le budget d’une exposition d’envergure nationale dans un musée « services à compétence nationale » s’élève à 200 000-300 000 euros.

Au Grand Palais, lieu emblématique des expositions françaises d’envergure internationale, « certains coûts sont spécifiques au lieu même, qui ne sert que pour des expositions temporaires. La surveillance et l’accueil, qui seraient centraux et reversés au budget général de fonctionnement dans d’autres endroits, représentent un poste colossal. Pour un coût très moyen d’exposition de l’ordre de 2,4 millions d’euros, il faut compter 1 million d’euros rien que pour ouvrir les portes », explique très concrètement Philippe Platel, du département des expositions à la Réunion des Musée nationaux-Grand Palais (RMN-GP). De quoi relativiser l’ampleur des budgets, si décriée par certains, des expositions dites « blockbuster » de l’institution parisienne.

Gardiennage et logistique
La sécurité et le gardiennage du lieu d’exposition représentent souvent un poste de première importance dans le budget lorsqu’un musée veut montrer des chefs-d’œuvre. Pour rassurer les prêteurs publics comme privés, il faut multiplier les mesures de protection : contrôler régulièrement les systèmes de sécurité, rémunérer un personnel nombreux et disponible 24 heures sur 24, louer des matériels de détection, ou bien externaliser ces services auprès d’une société privée. Cette ligne de dépenses peut ainsi représenter entre 20 % à 30 % du budget total et décourager certaines structures aux moyens limités.

Tandis que le bâtiment est sécurisé, le projet est élaboré : il faut rémunérer les équipes scientifiques qui travailleront pendant deux, trois, voire quatre ans sur le dossier. Dans la plupart des musées, ces lignes de dépenses sont prises sur la masse salariale. Mais il arrive qu’un commissaire indépendant soit rémunéré, entre 20 000 et 30 000 euros en moyenne, selon le degré d’investissement et le statut de la personnalité invitée : paradoxalement, le coût de la rémunération scientifique ne représente souvent qu’une part minime du budget global.

La logistique constitue le deuxième poste en ordre d’importance, et recouvre les frais d’assurance, de transport et d’accrochage. Les valeurs d’assurance peuvent représenter une part non négligeable du budget, comme l’a mis en lumière l’exposition « Picasso et les maîtres » en 2008-2009 au Grand Palais. À l’époque, la prime se montait à 790 000 euros pour un budget de 4,5 millions d’euros, soit pratiquement 1/5e de l’enveloppe, l’État garantissant les dommages au-delà de 100 millions d’euros… Les chiffres sont très disparates selon les prêteurs et les institutions. Certains prêteurs préfèrent contracter une assurance avec leur compagnie habituelle, des dispenses d’assurance sont pratiquées entre certains musées de France, et aussi le poids des acteurs peut jouer auprès des assureurs. À la RMN, « au regard de nos volumes, nous avons des taux de prime d’assurances intéressants, cela joue évidemment sur les budgets », confie Philippe Platel.

Le transport engage des frais incompressibles eu égard à la conservation des œuvres. Les appels d’offres lancés auprès des sociétés spécialisées dans le convoiement des œuvres d’art peuvent vite s’envoler. À titre d’exemple, la traversée transatlantique d’une œuvre dans une caisse climatique, escortée par un convoyeur (de moins en moins en classe affaires) peut coûter jusqu’à 30 000 euros : organiser une exposition sur Edward Hopper, avec des œuvres provenant exclusivement de l’étranger, a un prix. Là encore, certains musées font alors le choix de puiser au sein de leurs propres collections ou des collections voisines. La mutualisation des transports est aussi une façon de réduire les coûts, mais souvent les organisateurs se heurtent aux volontés des préteurs, qui ont à cœur d’assurer le bon convoiement de leurs œuvres.

Accrochage
Une fois les œuvres arrivées à bon port (dans le cas où l’installation d’une œuvre monumentale nécessite la location d’une grue et le dépôt des huisseries d’une baie vitrée, compter 30 000 euros la journée de travail), il s’agit de les exposer. Parfois, des frais de « bichonnage » et d’encadrement des œuvres s’ajoutent à la facture. Ainsi, pour la prochaine exposition du Palais Lumière à Evian à l’été 2015, « Jacques-Émile Blanche », conçue en partenariat avec le Musée des beaux-arts de Rouen, il a été demandé au Palais de prendre en charge les frais d’encadrement et de restauration, à hauteur de 55 000 euros.

Scénographie et communication

Les frais de scénographie varient également selon la typologie des œuvres : peindre des cimaises revient moins cher que concevoir des vitrines d’arts décoratifs. Au Grand Palais, une exposition avec vitrine coûte en moyenne 350 euros du mètre carré, contre 200 euros pour une exposition de peintures. Certaines institutions choisissent de réemployer socles et vitrines, à l’image de la Bibliothèque nationale de France, dans une démarche de développement durable et de contraction des coûts.

Enfin, il faut communiquer. Suivant la renommée du musée et sa recherche de visibilité, ce poste peut atteindre 40 % de l’enveloppe. Lorsque Yerres présente « Caillebotte » au centre d’art et d’expositions de la Ferme Ornée en 2014, la dépense en communication s’élève à 325 000 euros sur un total de 885 000 euros. Soit près de 30 % du budget global pour attirer les visiteurs dans un lieu peu connu du grand public en s’adjoignant les compétences d’une entreprise de communication et en achetant des espaces publicitaires. Ce coût sera naturellement moindre lorsque la communication sera confiée à une équipe interne, notamment dans les musées municipaux.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°431 du 13 mars 2015, avec le titre suivant : Les principaux postes et leurs coûts

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