Les PME dans la course

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 6 janvier 2006 - 835 mots

Aux côtés des grands groupes, les petites et moyennes entreprises (PME) jouent, elles aussi, un rôle essentiel dans le développement du mécénat culturel.

Si les opérations menées par Vinci à la galerie des Glaces de Versailles ou par Total à la galerie d’Apollon du Louvre font beaucoup parler d’elles, le mécénat culturel, contrairement à des idées reçues, n’est pas l’apanage des grands groupes. Et les petites et moyennes entreprises n’ont pas attendu les déductions fiscales de loi du 1er août 2003 (60% de la somme investie déductible d’impôt avec un plafonnement à 5% du chiffre d’affaires) pour participer à l’aventure. Ainsi des soieries lyonnaise Brochier, l’une des premières entreprises à avoir obtenu les oscars de l’Association pour le développement du mécénat industriel et commercial (Admical), organisme qui œuvre à la promotion du mécénat depuis plus de vingt ans. On observe cependant, depuis un an et demi, un réel
accroissement du phénomène : des entreprises de toutes les tailles et de la France entière se lancent dans le mécénat, en constituant leur propre fondation (une quarantaine ont vu le jour depuis 2003), et ce particulièrement au profit de la culture. Créée par la loi de 1990, la fondation d’entreprise, contrairement à la fondation reconnue d’utilité publique, n’implique pas la constitution d’un capital, mais seulement un engagement pluriannuel. L’année qui avait suivi la loi de 1990, une trentaine de fondations d’entreprise avaient d’ailleurs vu le jour et aujourd’hui, la France en compte environ 170 (dans toutes les disciplines). D’après une étude menée par le ministère de la Culture sur un panel de deux mille entreprises, 30 % du mécénat culturel provient d’entreprises de moins de cent salariés – le chiffre était de 15 % il y a deux ans, toutes causes confondues. Pour une institution comme le Centre international du vitrail, fondé à Chartres (Eure-et-Loir) en 1980, 11 % de son budget global de fonctionnement provient du mécénat, et ce dernier est assuré pour un tiers par des PME : les Minoteries Viron, la RÉMA et la banque CIC Banque BRO travaillent de concert avec de grandes entreprises comme Gaz de France ou la Compagnie de Saint-Gobain pour soutenir le centre. On pourrait citer aussi l’action exemplaire opérée au domaine du château de Versailles, où différentes PME ont été sollicitées pour restaurer une trentaine de statues (lire p. 17).

L’union fait la force
Pour des projets de grande envergure, les PME peuvent se regrouper en clubs d’entreprises. D’après une étude de l’Admical, le « ticket d’entrée » dans ces clubs est d’environ 1 500 euros. S’il y a un risque pour les PME de voir leur image se diluer dans un club, elles profitent en contrepartie d’un effet « réseau ». Ce mécénat collectif prend de plus en plus d’ampleur. L’association Mécénat Bretagne a ainsi vu le jour en octobre 2003 pour offrir au Musée de Pont-Aven (Finistère) un pastel de Gauguin, Deux Têtes de Bretonnes, proposé aux enchères en décembre de la même année. Amorcé par des entreprises bretonnes, le projet a connu un véritable engouement populaire, incitant d’autres PME et des particuliers à participer à l’aventure. Dépassant les espérances, l’opération a permis d’acquérir l’œuvre sans problème.  Comme l’indique Patrick Monéger (expert-comptable et commissaire aux comptes, associé d’Exco Bretagne), l’un des trois initiateurs de Mécénat Bretagne, « la loi du 1er août 2003 relative au mécénat a été un levier puissant pour solliciter les entreprises […]. Nous avons pu expliquer facilement qu’un versement de 100 euros ne coûtait en fait que 40 euros » (cité dans la revue Échanges no 221, mai 2005). Certes, les avantages fiscaux sont souvent un déclencheur pour le mécénat, mais ils ne sauraient masquer une réelle motivation de la part des PME, conscientes des impacts en termes d’image, de communication interne et externe. Des vocations sont nées dans ces entreprises et nombre d’entre elles ont désormais en leur sein des spécialistes de la question. Mais il reste encore de nombreux efforts à fournir : sur les deux millions de PME françaises, seulement une sur huit mille fait du mécénat, contre une sur huit en Suisse ! Le mécénat ne profite pas non plus également aux multiples disciplines artistiques. La musique remporte la majorité des suffrages auprès des sociétés, suivie des arts plastiques et du patrimoine ; d’autres domaines, comme le spectacle vivant, restent les parents pauvres d’un engagement des entreprises pourtant en plein essor.

Rencontres à Royaumont

Les 3 et 4 février, à l’abbaye de Royaumont (Val-d’Oise), le ministère de la Culture et la Fondation Royaumont organisent les premières rencontres internationales ayant pour thème « Le mécénat, acteur du développement culturel et artistique ». L’événement réunit une centaine de participants, des directeurs d’institutions culturelles européennes (Henri Loyrette, Christine Albanel), Jacques Rigaud, président de l’Admical, Frédéric Didier, architecte en chef des Monuments historiques, Laurent Salomé, directeur des Musées de Rouen, Juan Ignacio Vidarte, directeur du Musée Guggenheim de Bilbao, Alexander von Vegesack, directeur du Vitra Design Museum de Weil am Rhein, en Allemagne…) et des praticiens internationaux du mécénat. Renseignements : www.culture.fr

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°228 du 6 janvier 2006, avec le titre suivant : Les PME dans la course

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