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Le complexe financement du nouvel établissement du mont-Saint-Michel

Par Francine Guillou · Le Journal des Arts

Le 2 janvier 2020 - 664 mots

MONT-SAINT-MICHEL

Le décret de création de l’établissement public qui va gérer le Mont et la baie laisse en suspens le sujet concernant une partie de ses recettes.

Mont-Saint-Michel. Trois premiers ministres et deux ministres se sont penchés sur ses fonts baptismaux : l’établissement public national à caractère industriel et commercial (Épic) du Mont-Saint-Michel est né le 1er janvier 2020. Il prend le relais d’un syndicat mixte à bout de souffle devant les défis qui attendent l’abbaye classée à l’Unesco et sa baie reliant la Bretagne à la Normandie. C’est le résultat de près de quatre années de discussions, de réflexions et d’arbitrages. Mais les pourparlers sur son financement se poursuivent encore.

D’après le décret portant création de l’établissement, l’Épic « a pour mission d’assurer le rayonnement national et international du site du Mont-Saint-Michel, en associant les collectivités territoriales ». Il sera ainsi chargé du « maintien du caractère maritime » du Mont avec la maintenance des ouvrages hydrauliques de la baie. Il devra mettre de l’ordre dans le fonctionnement des navettes et des parkings, essentiel à l’attractivité touristique du site, et, « dans le cadre d’une convention avec le CMN […], il contribue à concevoir et mettre en œuvre la politique en matière de programmation culturelle, de promotion touristique et commerciale et de tarifs relative à l’abbaye du Mont-Saint-Michel ». Le décret prévoit que le directeur de l’Épic aura également rang d’administrateur au sein du Centre des monuments nationaux (CMN).

Les recettes de l’abbaye au centre des débats

Une solution sur mesure pour le site, qui sécurise l’action du CMN et ses prérogatives patrimoniales (le Centre reste chargé des travaux d’entretiens et de restaurations de l’abbaye), et maintient les recettes du site dans le giron du CMN. Ces recettes sont critiques pour l’équilibre économique du centre : les recettes d’entrée de l’abbaye du Mont-Saint-Michel couvrent le déficit cumulé des vingt-sept plus petits monuments gérés par le CMN. « Autrement dit, un monument sur quatre dépend de l’argent généré au Mont-Saint-Michel », souligne Philippe Bélaval, président du CMN. Celui-ci se réjouit de la création de l’Épic, dont il espère qu’il assurera « une meilleure coordination des acteurs du Mont, de Granville à Cancale ».

Associer les Régions Normandie et Bretagne, les Départements de la Manche et de l’Ille-et-Vilaine, Avranches, Saint-Malo, trois autres communes du Mont-Saint-Michel, l’État et le CMN : autant de potentiels financeurs de l’Épic, dont le budget en rythme de croisière est estimé à 8 millions d’euros. Pour certains élus, la pérennité financière aurait pu être assurée par le transfert des recettes de l’abbaye du CMN à l’Épic, soit 8,7 millions d’euros en 2018. C’est la position du sénateur de la Manche, Philippe Bas, qui avait déposé un amendement en ce sens. « La viabilité financière [de l’Épic] n’est pas assurée », déplore le sénateur, qui craint que le financement de l’établissement pèse sur les comptes publics. « L’État en est à réclamer aux collectivités de hausser leurs participations », soutient l’élu, qui prédit plusieurs mois de négociations avec les collectivités pour abonder le budget.

Le CMN marche naturellement sur des œufs sur la question du financement. S’il a évité le transfert des recettes du site, avec le soutien du gouvernement et du ministère de la Culture, il devra verser une contribution annuelle, dont les arbitrages sont attendus. « Il faut que le montant de ce financement ne mette pas en danger le CMN », prévient Philippe Bélaval, qualifiant le chiffre de 2 millions d’euros qui circule dans la presse régionale d’« hypothèse très très haute ».

Le président rappelle fort opportunément l’incendie de Notre-Dame à Paris qui prive le CMN de précieuses recettes de la billetterie d’accès aux tours pour plusieurs années. Un manque à gagner de plus de 3 millions d’euros par an. Toutes ces questions épineuses devront trouver réponse dans les premières semaines de 2020.

Malgré ces incertitudes, une bonne nouvelle a été annoncée : le ministère de la Culture a dégagé 7 millions d’euros pour la poursuite de la restauration de la Merveille du Mont-Saint-Michel – les deux bâtiments du nord face à la mer – jusqu’en 2022.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°536 du 3 janvier 2020, avec le titre suivant : Le complexe financement du nouvel établissement du mont-Saint-Michel

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