Centre culturel

La « Maison des mondes africains » ouvre enfin

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 27 octobre 2025 - 572 mots

Longtemps retardé, ce lieu culturel consacré à la pensée et à la création africaine s’ancre dans le nord-est parisien.

Liz Gomis, directrice de la MansA. © Mariette Kouame / MansA
Liz Gomis, directrice de la MansA.
© Mariette Kouame / MansA

Paris. « J’ai rêvé de ce lieu depuis mon enfance », reconnaît Élisabeth Gomis, la directrice générale de la MansA (Maison des mondes africains), soulagée de voir en ce 4 octobre se concrétiser le projet qu’elle porte depuis près de huit ans. Car si le rapport de l’historien et politologue camerounais Achille Mbembé remis en 2021 à Emmanuel Macron marque le point de départ officiel du projet, elle y a travaillé depuis 2017 alors qu’elle participait au Conseil présidentiel pour l’Afrique. Soulagement donc, puisque ce lieu culturel hybride a connu de nombreux retards, et des hésitations sur son implantation (locaux de la Fondation Cartier bd Raspail, salles de la Monnaie de Paris). Élisabeth Gomis avoue avoir découvert « l’art du compromis et le temps de l’administration » pendant ces huit années, loin du monde du journalisme d’où elle vient.

Le bâtiment choisi est plus modeste que ceux évoqués : il s’agit d’un ancien atelier de confection dans le 10e arrondissement de Paris, près de l’hôpital Saint-Louis. D’une surface d’environ 800 mètres carrés sur quatre niveaux, il dispose d’un espace central modulable, d’un salon de lecture et de musique, de bureaux et d’un grand sous-sol aménagé. À l’image de l’exposition inaugurale consacrée à Roxane Mbanga (née en 1996 à Paris, d’un père camerounais et d’une mère guadeloupéenne), qui occupe tous les espaces et trouble volontairement la perception des volumes, le lieu est amené à changer de forme selon les événements programmés.

Vue de l'exposition de Roxane Mbanga, « NOIRES » à la Maison des mondes africains. © Mariette Kouame / MansA
Vue de l'exposition de Roxane Mbanga, « NOIRES » à la Maison des mondes africains.
© Mariette Kouame / MansA

Si le bâtiment est lumineux et sa circulation, agréable, fluide (conçue par l’agence New South, Paris), la MansA a revu ses ambitions à la baisse : dans son rapport, Achille Mbembé envisageait un établissement comparable à l’Institut du monde arabe, d’une surface de 17 000 m2 sur neuf niveaux. Le diplomate Luc Briard, qui a géré la préfiguration de la MansA avec Élisabeth Gomis, évoquait, lui, « la Maison de la culture du Japon ou la Maison de l’Amérique latine ». Ces trois institutions n’ont pas le même statut, mais les représentants de pays étrangers y ont une place centrale ; ce n’est pour l’instant pas le cas à la MansA, ce qui suscite des critiques en Afrique.

Avec un budget abondé par le ministère de la Culture et celui de l’Europe et des Affaires étrangères à hauteur de 5 millions d’euros, la MansA peut envisager une programmation à long terme, dans le domaine des arts plastiques, du cinéma, de la littérature, de la musique et de la recherche. Seront explorés « des domaines souvent laissés en marge par les institutions françaises, comme le jeu vidéo africain », précise Imane Lehérissier, chargée de programmation.

Élisabeth Gomis insiste de son côté sur les partenariats déjà noués, notamment avec des universités en France et à l’étranger (Paris Nanterre, Sciences Po, Chicago University). Elle ajoute que la MansA vise à « laisser une trace et constituer des archives sur les cultures afro-descendantes, y compris en outre-mer », à travers un magazine et des médias en ligne. Selon Christine Folly, directrice générale adjointe, l’ouverture de la MansA suscite un engouement fort en France et à l’étranger parmi les diasporas africaines, au point que l’établissement est « constamment sollicité par des artistes et des chercheurs », au-delà de ses capacités de production ou d’accueil. L’implantation de MansA dans le 10e arrondissement est « temporaire, sans doute pour deux ans », précise-t-elle, signe que le projet est amené à grandir si ses soutiens perdurent.

Façade de la MansA. © Mariette Kouame / MansA
Façade de la MansA.
© Mariette Kouame / MansA
MansA,
26, rue Jacques-Louvel-Tessier, 75010 Paris, du mardi au dimanche, horaires variables, mansa.fr ; exposition inaugurale : « Roxane Mbanga, Noires », jusqu’au 26 octobre.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°663 du 17 octobre 2025, avec le titre suivant : La « Maison des mondes africains » ouvre enfin

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