Grande-Bretagne

Des nominations pittoresques à la Culture

Le Journal des Arts

Le 18 septembre 2012 - 670 mots

Les nominations de Maria Miller, nouveau ministre de la Culture, et de Peter Bazalgette, à la présidence de l’Arts Council d’Angleterre, ne suscitent pas l’enthousiasme général.

LONDRES - Dans le renouvellement gouvernemental annoncé par le Premier ministre britannique, David Cameron, le 4 septembre, l’ancien ministre de la Culture, des Médias et des Sports, Jeremy Hunt, a fait place à une personnalité plutôt méconnue de la vie politique britannique, Maria Miller. Après une licence en économie à la London School of Economics, elle devient directrice des agences publicitaires Rowland et Grey. En 2005, elle entre au Parlement du Royaume-Uni, et sera nommée sous-secrétaire d’État en charge des personnes handicapées au ministère du Travail et des Retraites de 2010 à 2012. Si la personnalité de Maria Miller, membre du Parti conservateur, ne fait pas réellement de vagues outre-Manche, sa nomination a quelque peu surpris la presse britannique. Maria Miller n’a en effet aucune expérience dans le milieu de la culture, même si elle se dit naturellement « ravie » de cette nomination et « consciente des nombreux challenges qu’implique cette mission ». Dom Foster, porte-parole des Libéraux démocrates en charge de la culture, a pour sa part exprimé à la fois son enthousiasme et ses craintes face à cette nomination. « Maria Miller devra trouver une façon d’associer culture et égalité pour tous, dans un ministère qui oublie parfois cet enjeu. » Le challenge est de taille puisque Maria Miller devra faire vivre un ministère affaibli par des réductions budgétaires drastiques, de l’ordre de 25 % en quatre ans. L’Association des musées d’Angleterre dresse quant à elle un portrait mitigé de la nouvelle ministre de la Culture, soulignant une femme déterminée et peu à l’écoute, faisant preuve d’un « léger goût pour la Culture ».

L’ « homme big brother »

Mais c’est la nomination de Sir Peter Bazalgette à la présidence de l’Arts Council qui a entraîné la plus grande levée de boucliers de la part du monde politique et des professionnels de la culture. Le remplaçant de Liz Forgan a en effet un profil bien particulier. Directeur artistique de la société de production Endemol jusqu’en 2007, c’est avec le lancement à la télévision anglaise de l’émission de téléréalité « Big Brother » qu’il s’est fait connaître. Vice-président de l’Opéra national d’Angleterre et président de la Royal Television Society, sa nomination ne laisse pas indifférent. Le député travailliste Denis MacShane n’a pas hésité à s’insurger dans les colonnes du quotidien Daily Mail. « C’est très inquiétant que quelqu’un ayant abaissé, banalisé, et érotisé la télévision avec l’émission “Big Brother” durant des années soit en charge de la culture britannique », déclare-t-il. Des propos qui ont été très vite rectifiés par le député conservateur Philip Davies. « Avoir créé “Big Brother” ne signifie pas qu’il est incompétent en matière d’arts. Je suis prêt à lui laisser sa chance. » Et les « unes » de magazines ne sont pas tendres avec celui qu’elles surnomment l’ « homme big brother ».

Si le directeur de l’Arts Council, Alan Davey, a publié un communiqué en bonne et due forme, soulignant l’« enthousiasme » et la « philanthropie » de son nouveau président, d’autres acteurs culturels se sont montrés beaucoup plus réservés. À l’exemple de l’ancien directeur du Victoria and Albert Museum et de la National Portrait Gallery, Roy Strong, qui regrette la nomination d’une personnalité « qui n’a cessé tout au long de sa carrière d’abaisser le niveau de la culture britannique ». Le directeur de la Tate, Sir Nicholas Serota, a fait part indirectement de son mécontentement, en déclarant être « profondément déçu » du départ de Liz Forgan. Si les réactions sont si crispées, c’est que la situation budgétaire de l’organisme est de plus en plus critique. L’Arts Council devra de nouveau diviser par deux ses coûts administratifs d’ici à 2015, après avoir déjà retiré son financement à 206 opérateurs culturels britanniques, dont 24 % œuvrent dans le secteur des arts visuels. La nomination de Peter Bazalgette sera effective en février 2013.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°375 du 21 septembre 2012, avec le titre suivant : Des nominations pittoresques à la Culture

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