États-Unis - Restitutions

Comment les Pandora Papers ont permis le retour d’antiquités au Cambodge

Par Julie Goy, correspondante en Espagne · lejournaldesarts.fr

Le 16 novembre 2021 - 448 mots

DENVER / ÉTATS-UNIS

La fuite de millions de documents et leur analyse par des journalistes ont conduit le musée de Denver à rendre quatre objets.

La déesse Prajnaparamita, grès, XIIe siècle, statue cambodgienne vendue au musée de Denver par le collectionneur Douglas Latchford. © Denver Museum of Art
La déesse Prajnaparamita, grès, XIIe siècle, statue cambodgienne vendue au musée de Denver par le collectionneur Douglas Latchford.
© Denver Museum of Art

Quatre objets antiques acquis par le Denver Art Museum (Colorado) entre 2000 et 2005 sont en cours de rapatriement vers le Cambodge. Parmi eux une relique du dieu-soleil et un linteau avec des sculptures des dieux hindous Vishnu et Brahma. Ce retour est la conséquence des « Pandora Papers » une enquête menée par le Consortium international des journalistes d’investigation et par le Washington Post qui, parmi de nombreuses autres révélations d’évasions fiscales, a permis de prouver que ces objets avaient été illégalement sortis du Cambodge par le spécialiste d’art Khmer Douglas Latchford. 

En 2019, le gouvernement des États-Unis avait inculpé Latchford car il était suspecté d’avoir vendu une centaine d’objets pillés au Cambodge lors des événements tragiques qui ont bouleversé le pays. Son décès est survenu avant la tenue de son procès, laissant le doute planer sur nombre de ses transactions. 

Un début de réponse a pu être obtenu grâce à une partie des 12 millions de documents qui constituent les Pandora Papers. Plusieurs dossiers mentionnent des compagnies secrètes offshore appartenant à Latchford. Les documents révèlent que trois mois après les premiers doutes des autorités américaines à son encontre, le marchand d’art avait créé deux « trusts » nommés Skanda et Siva, situés sur l’Île de Jersey et dans les Îles Vierges britanniques, deux paradis fiscaux notoires. 

Douglas Latchford y a placé sa collection d’antiquités, constituée de bronzes de Bouddha et d’autres figures religieuses. Leur confidentialité a rendu difficile le possible rapatriement de ces objets suspectés d’avoir été pillés. 

L’enquête menée par les journalistes a néanmoins démontré qu’au moins 27 objets pillés au Cambodge sont toujours conservés dans les collections de plusieurs grands musées. Ces derniers n’ont pas été en mesure d’apporter la preuve que ces objets avaient été exportés avec l’accord du gouvernement cambodgien. 

Six objets conservés au Denver Art Museum ont été acquis directement auprès de Latchford. Les Pandora Papers ont révélé plusieurs éléments concernant la statue de la déesse Prajnaparamita. Latchford avait fourni de faux documents lors de son acquisition. Parmi eux, une lettre d’un supposé collectionneur affirmant que Latchford lui avait acheté la pièce en 1999. Les enquêtes menées par les autorités américaines ont prouvé que de nombreuses fausses lettres avaient été produites, même après la mort de ce faux collectionneur en 2001. 

D’autres musées comme le Metropolitan Museum of Art coopèrent à l’enquête au même titre que le Denver Art Museum qui a rapidement retiré de ses collections les six œuvres suspectées d’avoir été pillées. En parallèle le gouvernement cambodgien continue de demander activement la restitution de nombreuses antiquités aux diverses institutions muséales. 
 

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