Table rase

Annulation de la vente d’une table Boulle au couple Pinault

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 12 novembre 2008 - 561 mots

La Cour de cassation donne raison aux Pinault pour l’annulation de la vente d’une table Boulle achetée à Drouot en 2001.

PARIS - Les Pinault auront-ils finalement gain de cause dans une affaire d’achat malheureux qui les a de nouveau poussés devant les tribunaux ? La Cour de cassation vient de leur donner raison. L’objet de la discorde est une table à écrire en marqueterie Boulle d’époque Louis XVI estampillée Charles Joseph Dufour, acquise par le couple de collectionneurs, le 14 décembre 2001 à Drouot pour 1,3 million d’euros, cent fois l’estimation ! (lire Le Journal des Arts, no 158, 8 novembre 2002, p. 26). L’estimation peut paraître ridicule comparée au résultat, mais tout le monde voulait cette table ainsi que les 146 autres lots de la vente, d’une même provenance prestigieuse. Tous ont été volontairement évalués de façon modeste par le cabinet Daguerre (expert de la vente), afin, justement, de ne pas trop attirer l’attention sur l’origine des œuvres. Des habitués ayant cependant remarqué les étiquettes d’inventaire de la famille Rothschild sur les lots, la vacation tourna à la foire d’empoigne. Plusieurs objets obtinrent à juste titre des enchères stratosphériques, ainsi la table Boulle que les antiquaires parisiens Kugel poussèrent jusqu’à un million d’euros contre les Pinault, nonobstant la mention « accidents et restaurations » portée au catalogue. Aussitôt après la vente, le bruit a couru que des acheteurs s’étaient laissés emporter pour certains objets qui, au regard de leur état et/ou de leur authenticité, se révélaient surpayés. Ce fut le cas de la table Boulle, après vérification par démontage du meuble, effectué par l’ébéniste des acheteurs. Les Pinault ont rapidement saisi la justice dans l’objectif annuler cet achat, invoquant l’erreur sur les qualités substantielles.
Une expertise judiciaire a indiqué que les restaurations intervenues au XIXe siècle portant sur les pieds, l’intérieur des tiroirs, le cuir du plateau et la dorure des bronzes étaient destinées à en assurer la conservation. Le 13 octobre 2005, le tribunal de grande instance de Paris a admis que de telles restaurations n’ont pas pour autant porté atteinte à l’authenticité du meuble et a débouté les Pinault, des « amateurs d’art éclairés et assistés d’un ébéniste lors de l’exposition », censés savoir ce qu’ils achetaient. En juin 2007, la cour d’appel de Paris confirmait ce jugement.

« Transformations »
Or le 30 octobre, la Cour de cassation est allée dans le sens du couple de collectionneurs et a cassé l’arrêt de la cour d’appel, estimant que des « transformations », et non pas seulement des « restaurations » d’usage comme indiqué au catalogue, avaient dénaturé le meuble. Pour Me Jean-Michel Darrois, l’avocat des Pinault, « cette décision contribue à assainir le marché des ventes à Paris ». L’affaire de la table Boulle a été renvoyée devant la cour d’appel de Paris, différemment constituée.

Rectificatif (paru dans le Journal des Art n° 292)

Après la publication de l’article intitulé « Table rase », dans le Journal des Arts n°291, du 14 novembre 2008, nous avons reçu la demande de rectificatif suivante : « Messieurs Alexis et Nicolas Kugel, mentionnés dans l’article concernant la procédure intentée par les Pinault pour annuler la vente d’une table Boulle passée à Drouot le 14 décembre 2001, tiennent à préciser qu’ils n’ont jamais porté d’enchères sur ce meuble contrairement à ce qui a été écrit et n’ont jamais eu l’intention de l’acheter ».

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°291 du 14 novembre 2008, avec le titre suivant : Annulation de la vente d’une table Boulle au couple Pinault

Tous les articles dans Actualités

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque