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Voyage maritime en Amérique latine

Par Anne-Cécile Sanchez · L'ŒIL

Le 28 octobre 2021 - 422 mots

Restaurant -  Le dépaysement, au restaurant de la Maison de l’Amérique latine, n’est pas là où on l’attend.

Pas d’empanadas, de tortillas, ni de guacamole au menu de cette table supervisée par Alain Ducasse, qui a racheté Rech en 2007, une institution de l’avenue des Ternes connue pour sa carte de poissons et de coquillages. Après avoir changé de propriétaire, Rech a ensuite déménagé boulevard Saint-Germain. Mais avec sa grande verrière ouvrant sur un jardin, on s’y sent loin, très loin de Paris. Lourds galets de Cancale poncés posés sur les nappes blanches, aquarium à homards et estampes de poissons accrochés au mur, le cadre pose un décor maritime en écho à une cuisine sage qui remplit agréablement son office. Au déjeuner, la formule en deux plats est abordable (36 euros), le service zélé, le lieu exceptionnel. Petites pâtes dans leur nage parfumée aux algues, yuzu et poutargue, en entrée, suivies d’un merlu de ligne, chou romanesco, blettes et raisin. Les amateurs de sucré opteront pour un dessert, au choix une subtile composition coing-citron ou, plus consistant, un éclair XL, une des spécialités de la maison, au chocolat, au café ou à la vanille. L’étincelle ? On l’aperçoit au-dehors à travers les vitres : c’est le titre de la superbe sculpture d’Alicia Penalba (1913-1982) placée devant la pelouse le temps de l’exposition que lui consacre l’espace culturel, en partenariat avec la galerie de l’avenue Matignon A&R Fleury. Ce bronze installé sur un lourd socle de pierre marque un tournant dans l’œuvre de l’artiste argentine qui, en 1957, achève sa série des Totems et aborde, avec ses Liturgies végétales, des lignes plus rondes, plus ouvertes. Plus sensuelles aussi. Alicia Penalba s’était installée en France en 1952. Elle est morte un soir de 1982, au volant de sa voiture, fauchée par un train. Cinq ans auparavant, le Musée d’art moderne de Paris avait célébré ses sculptures monumentales, car au fil du temps l’artiste s’était attaquée à des échelles de plus en plus spectaculaires. On a un peu oublié tout cela, tout comme on connaît peu son œuvre graphique abondante. L’exposition « Le langage des formes » dure jusque mi-décembre à la Maison de l’Amérique latine, jusque fin octobre seulement à la galerie qui a mis sept ans à rassembler la quarantaine de sculptures présentées. Cela donne envie d’en voir plus, et de découvrir les gravures, mais aussi les vases et les tapisseries que Penalba dessina. En attendant, on peut, le temps d’un déjeuner chez Rech, se réchauffer le cœur à la flamme dansante de cette Grande Étincelle.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°748 du 1 novembre 2021, avec le titre suivant : Voyage maritime en Amérique latine

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