Versailles s’éveille

Réouvertures en série dans le parc et le château.

Le Journal des Arts

Le 9 mai 1998 - 555 mots

Replantation de la Grande perspective, restaurations de bosquets, réouverture progressive du musée de Louis-Philippe : Versailles s’est lancé dans un vaste programme de rénovation et une politique dynamique d’accueil du public. Celui-ci peut dès à présent profiter de l’achèvement de la principale tranche de travaux, et découvrir un tiers du Musée de l’histoire de France, créé en 1837.

VERSAILLES - Un rayon de soleil est opportunément venu illuminer le Bosquet de l’Encelade pour son inauguration, le 9 avril, après quatre ans de restauration. Au centre de cette composition végétale et minérale dessinée en 1675 par Le Nôtre et Le Brun, le géant Encelade, enseveli sous les rochers qu’il tentait de lancer au ciel contre les dieux, a retrouvé sa dorure à la feuille d’or et crache de nouveau un puissant jet d’eau de 18 mètres, tandis que des jets secondaires s’écoulent de ses doigts.
Les parties périphériques, détruites au cours des siècles, ont été restituées dans leur l’état de 1700, année de la mort de Le Nôtre. La fontaine a retrouvé son triple emmarchement gazonné ponctué par huit vasques en rocaille, l’ensemble étant ceint par un berceau de treillage octogonal agrémenté de plantes odoriférantes et de topiaires en forme de vases.

Cette rénovation d’un des plus beaux “salons de verdure” de Versailles permet au visiteur de mieux apprécier la richesse d’un parc au style moins uniforme qu’on ne le croit souvent. Le classicisme du jardin à la française, incarné par la Grande perspective, se voit tempéré par les compositions des bosquets aux accents italianisants et baroques, qui multiplient les oppositions entre nature et architecture, et les jeux sur les quatre éléments.

La fin d’un scandale
En parallèle, la réouverture progressive du Musée de l’histoire de France créé par Louis-Philippe, qui couvre 15 000 m2 dans les ailes du midi et nord du château, met fin à un scandale quelque peu surréaliste : les salles, restaurées depuis les années cinquante, restaient interdites à la visite faute d’agents de surveillance. Les 40 postes manquants ayant été débloqués, on peut enfin admirer des œuvres telles que la Bataille de Taillebourg par Delacroix, reproduite dans la plupart des manuels d’histoire.

Si les salles des Croisades, avec leur décor néogothique et leur thématique guerrière mêlée d’orientalisme, témoignent surtout du goût et de l’idéologie du milieu du XIXe siècle, la galerie historique du XVIIe siècle, à l’étage, rassemble en revanche d’authentiques chefs-d’œuvre du Grand Siècle. Une enfilade de pièces meublées et tendues de couleurs vives regroupe plusieurs batailles de Van der Meulen – dont La reddition de Cambrai, rescapée du fameux escalier des Ambassadeurs –, des vues de résidences royales, des portraits et autoportraits d’artistes de l’Académie, signés Largillière, Rigaud, Mignard, François de Troy, Nattier et Coypel, et enfin des personnages princiers : La famille du Grand dauphin par Mignard, Louis XIV par Rigaud, ou encore le très dérangeant portrait de cire du roi.

Dans l’aile du midi, l’immense galerie des Batailles, dessinée par Fontaine et Nepveu – architectes de Louis-Philippe –, voit le triomphe de la peinture d’histoire. Le programme iconographique, exécuté notamment par Ary et Henri Scheffer, Horace Vernet et Eugène Delacroix, rend hommage aux figures guerrières qui “ont fait” la France, de Clovis à Napoléon Ier, pour s’achever, dans la salle de 1830, sur les Trois Glorieuses, avec cinq grandes compositions de Larivière, Gérard, Ary Scheffer, Court et Devéria.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°60 du 9 mai 1998, avec le titre suivant : Versailles s’éveille

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