Musée des beaux-arts de Lille

Ultime mois pour l’Ange

Par Emmanuel Fessy · Le Journal des Arts

Le 1 mai 1994 - 465 mots

La souscription lancée pour acquérir un tableau flamand s’achève fin mai.

LILLE - L’Ange aux ailes de papillon, serrant contre sa robe somptueuse un miroir où se reflète un crâne, rejoindra-t-il les collections du Musée des beaux-arts de Lille ? Il reste un mois aux amateurs de cette œuvre étrange du peintre anversois du XVIe siècle, Jan van Hemessen, pour contribuer, par leurs dons, à l’achat de ce tableau sur bois.

Un marchand français, Emmanuel Moatti, en demande 3,6 millions de francs. Les collectivités publiques ont accepté de verser 1,6 million, le reste devant être apporté par des contributions privées. Le musée a déjà rassemblé 1,8 million et doit encore recueillir 200 000 francs avant le 31 mai, sinon cette curieuse "Vanité" partira pour le Metropolitan Museum de New York ou le Toledo Museum of Art, qui "sont d’ores et déjà sur les rangs pour l’acquérir", affirme Arnauld Brejon de Lavergnée, conservateur général du Patrimoine au Musée des beaux-arts.

Pour le conservateur, il s’agit "d’un tableau exceptionnel, sans doute l’un des plus beaux qui soient apparus sur le marché de l’art depuis dix ans". "La finesse d’exécution, le coloris chatoyant sont caractéristiques de l’artiste, l’un des plus éminents romanistes flamands", ajoute-t-il. En outre, l’Ange est "totalement inédit, demeuré caché pendant trois siècles dans une collection dijonnaise". Il illustre une période et une école "pour lesquelles les découvertes sont rarissimes".

Étrange tableau, chatoyant et macabre, où non seulement un crâne mais un phylactère rappelle, en latin, que la mort est "voleuse de toutes choses", qu’elle est "la fin de la force, de la beauté et des richesses". L’ange devait exhorter un personnage se trouvant sur un volet droit, aujourd’hui disparu. Avec ses ailes, symbole de résurrection, il lui adresse également un message d’espoir. L’ensemble renouvelle l’iconographie habituelle de la "Vanité".

Ce tableau, d’un assez grand format (90 x 80 cm), viendrait à point nommé pour compléter la collection flamande du musée, riche en œuvres du XVIIe siècle, mais moins bien dotée pour le siècle précédent. Il serait une raison de plus de se rendre à Lille pour la réouverture – prévue en 1995 – du musée, actuellement en complète rénovation. Seul regret, avant de rejoindre la galerie d’Emmanuel Moatti, le tableau avait été mis en vente à Drouot où il avait été adjugé à un prix nettement inférieur. Mais à cette époque, le musée de Lille mettait toute son énergie à acquérir un Bonnard. La faiblesse des crédits d’acquisition dévolus aux musées français les empêche de courir deux lièvres à la fois, et parfois de faire de bonnes affaires.

- Les dons sont à envoyer avant le 31 mai à la Société des amis des musées, place de la République, 59000 Lille. Les chèques doivent être libellés à l’ordre de la Fondation de France, Opération Hemessen.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°3 du 1 mai 1994, avec le titre suivant : Ultime mois pour l’Ange

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