Soisic, capteur à tout faire

EDF et Mensi révolutionnent la photogrammétrie

Le Journal des Arts

Le 4 juillet 1997 - 551 mots

Un système innovant de modélisation en images de synthèse 3D mis au point par la Direction des études et recherches d’Électricité de France (EDF) et sa filiale Mensi ouvre la voie à de multiples applications dans le domaine de l’archéologie et des beaux-arts : répliques et reconstitutions informatiques tridimensionnelles, anastylose numérique, fac-similés réels…

PARIS. Dix ans de travail auront été nécessaires aux ingénieurs italiens pour prendre les dimensions exactes de la statue équestre en bronze de l’empereur romain Marc-Aurèle afin d’en réaliser la copie récemment installée au centre de la place du Capitole à Rome. Au mois de mars, le calcul des dimensions de l’Hercule Farnèse conservé au Musée archéologique de Naples n’aura en revanche demandé que trois journées de travail aux ingénieurs d’Électricité de France. Le capteur laser Soisic (Système autonome de saisie rapide de points 3D par triangulation laser) mis au point par Mensi, filiale d’EDF, associé au logiciel d’interprétation 3Dipsos développé en commun par les deux sociétés, sonne le glas de quarante ans de photogrammétrie traditionnelle.

Multiples applications
"Là ou les ingénieurs italiens ont récolté un million de points en dix ans, Soisic en a récolté près de trois millions en seulement 24 heures", affirme Marc Albouy, contrôleur général d’EDF et responsable du mécénat technologique. Le principe de la mesure par triangulation est le même, mais le système traditionnel à base de doubles photographies est aujourd’hui largement détrôné par la vitesse du laser. Ce dernier balaie la surface de l’objet à mesurer – une caméra vidéo analyse la tache rouge du faisceau à une cadence variable – avec une précision inférieure au dixième de millimètre. La saisie s’effectue à la cadence de cent points par seconde, et l’incertitude de mesure est de l’ordre du millimètre pour un objet distant de cinq mètres. Expérimenté dès 1993 avec la statue équestre d’Henri IV qui orne le Pont-Neuf à Paris, le capteur Soisic a également été utilisé pour la modélisation numérique de la grotte Cosquer en 1995, "où 5 millions de points tridimensionnels ont été collectés en 67 heures, précise Marc Albouy, contre un coût de l’ordre de 30 millions de francs et 50 ingénieurs/an si la méthode traditionnelle avait été mise en œuvre !" Ce relevé laser a permis de réaliser un fac-similé en images de synthèse de la grotte paléolithique, qui pourrait servir à l’élaboration d’un fac-similé réel. De même, à partir des vestiges du site de Marmaria à Delphes, Soisic a permis la reconstitution informatique tridimensionnelle du sanctuaire d’Athéna qui vient d’être présentée dans la chapelle de la Sorbonne. Mais le capteur peut également être utilisé pour l’anastylose numérique – cela a été le cas pour une statue d’Auguste exposée au Musée de l’Arles antique – et la reproduction stéréolithographique. Dans cette intention, après avoir travaillé sur le marbre de l’Hercule Farnèse, EDF teste le capteur Soisic sur différents matériaux : le bronze, la terre cuite, l’argent… En juin, les célèbres bronzes de Riace passeront également entre les mains des ingénieurs d’EDF, qui se déplaceront à Reggio di Calabre pour l’intervention. Cette technologie ouvre la voie à la reproduction en série de toute sculpture, mais pour l’heure, la Réunion des musées nationaux s’est contentée d’y recourir pour les répliques en résine de deux sculptures d’Angkor (Tête de Jaya­var­man VII et Harihara, 1250 et 1595 francs) vendues dans ses boutiques.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°41 du 4 juillet 1997, avec le titre suivant : Soisic, capteur à tout faire

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque