Le Japon revoit sa gestion

Des capitaines d’industrie à la tête des musées de TokyoDes capitaines d’industrie à la tête des musées de Tokyo

Le Journal des Arts

Le 13 avril 2001 - 581 mots

Président honoraire des Brasseries Asahi, Hirotaro Higuchi, soixante-quinze ans, a été nommé, en début d’année, à la tête du Musée d’art contemporain de Tokyo (MOT) par le gouverneur Shintaro Ishihara. Le nouveau directeur vient d’annoncer une série de propositions radicales afin de sortir l’institution de l’impasse financière dans laquelle elle se trouve, accusant une perte de 16 milliards de yens (962 millions de francs) pour l’exercice financier clos en mars 2000.

TOKYO (de notre correspondante) -. Hirotaro Higuchi a l’intention de demander un audit de la collection et de vendre une bonne partie des œuvres d’art du musée. Pour compenser, il entend obtenir des prêts temporaires auprès de collectionneurs qui possèdent des pièces particulièrement importantes. Par ailleurs, souhaitant attirer davantage de jeunes visiteurs au musée, il propose d’y exposer des Ferrari ou des Porsche... Les finances du MOT semblent en effet dans une situation désastreuse. Ses recettes totales se chiffraient à 132 millions de yens (8 millions de francs) pour l’exercice qui a pris fin en mars 2000, tandis que ses dépenses s’élevaient à 1,77 milliard de yens (106 millions de francs).

En outre, la fréquentation est passée de 500 000 visiteurs – sur douze mois, d’avril 1997 à mars 1998 – à 262 104 visiteurs pour la période qui s’étend d’avril 1999 à mars 2000.

La controverse concernant le MOT est antérieure à l’ouverture du musée en mars 1995. Les conservateurs avaient dépensé environ 6,3 milliards de yens (379 millions de francs) en acquisitions avant même que sa construction – d’un coût de 41,5 milliards de yens (2,5 milliards de francs) – ne fût terminée. De plus, la localisation du MOT, dans la banlieue de Kiba, n’a pas vraiment motivé le public japonais. Lors de la campagne pour l’élection du gouverneur en 1999, tous les candidats promettaient de fermer ce lieu devenu un symbole du boom économique et des dépenses démesurées. Le gouvernorat de Tokyo croulant actuellement sous les dettes, chaque département est passé au peigne fin, y compris celui des musées municipaux. Au nombre de cinq, ceux-ci ont ainsi vu leur budget sévèrement revu à la baisse au cours des dernières années. Lors de l’évaluation du MOT l’an passé, sa gestion a été très critiquée pour avoir acquis 150 millions de yens (9 millions de francs) une centaine d’œuvres qui n’ont jamais été exposées depuis l’ouverture de l’institution.

Le gouverneur Shintaro Ishihara, réputé pour ses avis tranchés, a condamné ouvertement la gestion des musées et des centres d’art dépendant de la Ville. Il refuse l’idée selon laquelle les directeurs de musées doivent être des historiens de l’art ou des spécialistes de musées, et préférerait plutôt confier les institutions culturelles à des gestionnaires du secteur privé. Lorsqu’il a présenté à la presse le nouveau directeur du MOT, le gouverneur Shintaro Ishihara a fait l’éloge d’Hirotaro Higuchi, déclarant : “Je souhaiterais qu’à terme il supervise toute l’action culturelle du gouvernorat de Tokyo.”

Dans la même logique, il a nommé en novembre dernier Yoshiharu Fukuhara, président du groupe de cosmétiques Shiseido, au poste de directeur d’une autre institution, le Musée municipal de photographie de Tokyo. Cette nomination a eu lieu peu de temps après la mort, en septembre 2000, de l’ancien directeur, Yasuyoshi Tokuma, président de l’empire des médias Tokuma Shoten, six mois seulement après avoir pris ses fonctions. Déjà, à l’époque de sa nomination, le gouverneur Shintaro Ishihara avait vigoureusement défendu son choix en avançant qu’une connaissance solide du monde des affaires valait mieux que celle de l’histoire de la photographie.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°125 du 13 avril 2001, avec le titre suivant : Le Japon revoit sa gestion

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque