Le chaînon manquant de Florence

La restauration de la chapelle des Espagnols s’achève à Santa Maria Novella

Le Journal des Arts

Le 16 mars 2001 - 568 mots

Dans l’histoire de la peinture florentine, Andrea di Bonaiuto, dit Andrea da Firenze, actif dans la seconde moitié du XIVe siècle, apparaît comme le chaînon manquant entre Giotto et Masaccio. En cours d’achèvement, la restauration de son œuvre majeure, la chapelle des Espagnols, au couvent de Santa Maria Novella, a permis d’en assurer la sauvegarde.

FLORENCE (de notre correspondante) - Dans l’église et le couvent de Santa Maria Novella, de nombreuses restaurations ont été entreprises sur les œuvres qui constituent une véritable anthologie de l’art florentin. Le retour du Crucifix de Giotto est attendu, l’intervention sur la Trinité de Masaccio est à présent terminée et la restauration des fresques d’Andrea di Bonaiuto, dit Andrea da Firenze, dans l’ancienne salle capitulaire du couvent, touche à sa fin. On y accède par une porte ouvrant sur le côté nord du Cloître Vert, peint par Paolo Uccello. Construite par Jacopo Talenti en 1350, et décorée par Andrea vers 1365-1367, cette pièce est aujourd’hui connue sous le nom de chapelle des Espagnols, puisque, vers 1540, la duchesse Éléonore de Tolède, épouse de Cosme Ier, décida de la consacrer aux devoirs religieux des Espagnols de sa suite. L’iconographie se réfère au Miroir de la pénitence de Jacopo Passavanti (1208-1357), prieur du couvent. Celui-ci proposa en effet au commanditaire, le marchand Guidalotti, le thème de “l’Ordre des Dominicains et la nouvelle voie ouverte au salut”.

La restauration des peintures est encore en cours sur la dernière paroi et elle a commencé depuis peu sur la voûte, précisément par la voile de la Nef des Apôtres sur la mer de Galilée. Il restera ensuite trois panneaux : la Résurrection, l’Ascension et la Pentecôte. Dans son ensemble, la restauration s’est dès le début révélée très délicate : la chapelle avait en effet subi des dégâts considérables lors de l’inondation de 1966 et les restaurateurs d’alors avaient fait un usage abondant des résines acryliques. Une molécule mise au point par une équipe du Département de chimie de l’université de Florence a permis de consolider les motifs décoratifs sans en perdre la matière. Aux endroits les plus dégradés, on a retrouvé d’importantes couches de plâtre et une grande quantité d’oxalate. Les douze échantillons prélevés ont indiqué une présence importante de liants organiques et de solutions appliquées au cours des siècles lors des diverses restaurations. Avant 1967, plusieurs interventions avaient eu lieu sur les fresques : outre celle du XIXe siècle, une des plus importantes avait été réalisée au XVIIIe siècle, notamment sur le mur de droite où est représenté le Triomphe de l’ordre dominicain, par un dénommé Agostino Veracini. Celui-ci semble avoir tiré le meilleur parti de sa connaissance des fresques. En effet, c’est probablement à ce Veracini que l’on doit la réfection du campanile de Giotto ; or, celui-ci figure dans la fresque tel que nous le découvrons aujourd’hui, alors qu’Andrea da Firenze ne pouvait l’avoir vu achevée. Andrea ne manquait pas d’imagination puisqu’il avait couronné la basilique Santa Maria del Fiore d’une coupole, longtemps avant que Brunelleschi ne trouve la solution pour la réaliser.

Aux dégâts de l’humidité se sont ajoutés, sur le soubassement du mur de gauche, des phénomènes étendus de sulfatation provoqués par la centrale technique de l’École des carabiniers et d’anciens bains désaffectés. Toutes les causes de ces dégradations ont été éliminées et réparées. Financé par la Surintendance, le coût de ces interventions s’élève, pour l’instant, à plus de quatre millions de francs.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°123 du 16 mars 2001, avec le titre suivant : Le chaînon manquant de Florence

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