Patrimoine

La Salle d’ambre retrouvée

L’Amérique apporte son soutien à la Russie pour restaurer cette œuvre d’art

Par Anne Nesteroff · Le Journal des Arts

Le 1 mai 1996 - 604 mots

La Salle d’ambre du Palais de Tsarskoïe Selo, offerte en 1716 par Frédéric-Guillaume Ier, roi de Prusse, à Pierre le Grand, a disparu durant la Seconde Guerre mondiale. Les Russes ont pris la décision de reconstituer à grands frais cette œuvre d’art, la plus élaborée jamais réalisée en ambre. Pour achever les travaux, dix tonnes d’ambre sont encore nécessaires. L’American Museum of Natural History, à New York, en expose quelques pièces.

NEW YORK - Jusqu’à l’occupation allemande, en septembre 1941, du palais de Tsarskoïe Selo, dans le village de Pouchkine proche de Saint-Pétersbourg, la Salle d’ambre offerte à Pierre le Grand par Frédéric-Guillaume Ier, en 1716, était le joyau des collections russes. Démontés en 1941, les panneaux d’ambre – d’une valeur estimée aujourd’hui à 150 millions de dollars – furent envoyés au Schloss Königsberg où, selon le directeur des collections d’art, ils furent détruits lors d’un bombardement en avril 1945, mais, faute de preuves irréfutables, le doute subsiste. La Salle d’ambre a pu être volontairement brûlée ou, comme l’a déclaré Boris Eltsine, secrètement conservée dans une collection privée allemande.
 
Dans les années soixante-dix, la Russie a reçu en don les archives de Johann George Stein, qui avait mené des recherches sur la Salle d’ambre. Le 10 avril 1979, le conseil des ministres de l’URSS prit la décision d’entreprendre une réplique de la célèbre salle. Depuis 1979, des artisans sont au travail dans les ateliers installés à Tsarskoïe Selo. Après avoir étudié les collections du Mu­sée de l’Ermitage et de l’Armurerie de Moscou, ainsi que des photographies sur plaque de verre en noir et blanc et une seule photographie en couleur datant d’avant-guerre, ils sont parvenus à reconstituer en partie les milliers de pièces dont était composé le décor. Les artistes avaient joué sur toutes les nuances de l’ambre – dont près de 250 existent dans la nature –, pour créer une lumière dorée. Ivan P. Saoutov, directeur général des musées du palais de Tsarskoïe Selo, estime qu’il faudra encore dix tonnes d’ambre de la Baltique pour achever le travail, seul un tiers de la salle étant pour l’instant reconstitué.

250 dollars le kilo
À l’occasion de l’exposition "L’Ambre, fenêtre sur le passé", les Russes ont confié des éléments de la Salle d’ambre à l’American Museum of Natural History de New York. Le prix de l’ambre est d’environ 250 dollars le kilo, et M. Saoutov ne dispose pas de la somme nécessaire à la poursuite de l’entreprise. Le musée a donc décidé de sensibiliser le grand public à ses difficultés en exposant la reconstitution partielle de la Salle d’ambre, qui comporte une table d’angle et ses panneaux adjacents en marqueterie, ainsi que plusieurs pièces en ambre sculpté ayant appartenu à la famille impériale. Il faudra encore une dizaine d’années aux restaurateurs pour achever l’ensemble.

Le musée présente également "L’Ambre dans la nature", un grand diorama où, autour d’une forêt – des bosquets d’arbres représentant une forêt d’ambre – sont disposés des spécimens d’ambre fossile provenant de la République dominicaine et du Mexique. De minuscules plantes et des insectes transportés dans les airs se sont englués dans la résine il y a entre 23 et 30 millions d’années. Des fossiles de fleurs du crétacé, datées de 65 à 94 millions d’années, ont été retrouvées dans des échantillons d’ambre provenant de l’État du New Jersey, sur lesquels des chercheurs sont parvenus à prélever des échantillons d’ADN appartenant à des espèces disparues. Le catalogue de l’exposition par David A. Grimaldi, Amber: Window to the past, est édité par Abrams (49,50 dollars).

AMBER : WINDOW TO THE PAST, American Museum of Natural History, New York, jusqu’au 2 septembre.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°25 du 1 mai 1996, avec le titre suivant : La Salle d’ambre retrouvée

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