Chili, Burkina Faso, quand le changement climatique affecte le patrimoine

Les maisons peintes de Tiébélé, au Burkina Faso, inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO, présentent des signes préoccupants de détérioration liés au changement climatique. Les statues moaï d’Ahu Tongariki, sur l’île de Pâques, sont également menacées par la montée du niveau de la mer. Ces sites ne sont que quelques exemples récents des effets inquiétants du changement climatique sur de nombreux sites patrimoniaux.

Tiébélé abrite une cour royale datant du XVIe siècle, ornée de motifs géométriques représentant la culture, la pensée et la religion du peuple Kassena. Ces décors disparaissent progressivement en raison d’un climat devenu erratique. L’île de Pâques conserve près de 900 statues érigées entre le Xe et le XVIe siècle par le peuple Rapa Nui, destinées à honorer leurs ancêtres et leurs chefs. La plateforme cérémonielle d’Ahu Tongariki rassemble 15 de ces sculptures. Situé en bord de mer, le site avait déjà été endommagé lors du séisme de magnitude 9,5 dont le tsunami avait dispersé plusieurs statues sur l’île. La hausse du niveau marin accroît aujourd’hui leur exposition aux vagues.

À Tiébélé, les habitants, en particulier les plus âgés, observent une modification du rythme climatique. Les édifices de la cour royale subissent davantage d’intempéries. Là où il ne pleuvait qu’une fois par saison, les précipitations se sont multipliées et intensifiées ; inversement, les pluies d’août, autrefois fréquentes, se font rares. Cette imprévisibilité complique l’entretien du site : « Pour peindre les murs, ils doivent être parfaitement secs, mais maintenant la pluie est imprévisible, et il est déjà arrivé qu’il pleuve pendant que nous travaillons à la restauration », explique Anè au Guardian. Les périodes de sécheresse aggravent également l’érosion. La cour royale illustre ainsi les effets directs du changement climatique sur le patrimoine et sur le peuple Kassena, dont l’identité est étroitement liée à ce site. La pollution chimique locale accentue encore les difficultés de conservation.

Sur l’île de Pâques, selon des estimations, la montée des eaux pourrait d’ici 2080 menacer 50 sites. Paoa, membre du peuple Rapa Nui, a développé un jumeau numérique de la côte est pour simuler l’impact des vagues. Si les statues ne sont pas encore directement atteintes, les projections sont préoccupantes.

Le contraste entre les pays du Nord et ceux du Sud demeure marqué. Les pays du Sahel, dont le Burkina Faso, ne représentent qu’1 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, mais connaissent un réchauffement 1,5 fois plus rapide que la moyenne. Faute de moyens suffisants, ces États subissent les effets du changement climatique sans disposer de ressources pour y faire face.

Un rapport de l’UNESCO publié en juillet alerte sur les risques pesant sur les sites méditerranéens du patrimoine mondial. L’étude porte sur 114 villes, dont deux tiers déclarent avoir déjà subi des aléas climatiques : températures élevées, sécheresses, inondations ou incendies. La montée du niveau de la mer, estimée entre 0,5 et 0,67 mètre, constitue l’un des principaux dangers pour les sites côtiers. Les effets varieront selon les régions, mais l’ensemble du patrimoine est considéré comme vulnérable à long terme.

Les impacts sont multiples : économiques, avec une baisse attendue du tourisme, mais aussi culturels. La disparition d’un site entraîne celle d’une mémoire, d’une identité et d’un savoir-faire. L’UNESCO recommande d’adapter les politiques patrimoniales au changement climatique et de mettre en place des stratégies durables de préservation face aux menaces telles que la montée des eaux ou les incendies.