66 dessins de Félicien Rops

Indépendante et pluraliste, la Fondation Roi Baudouin est un acteur majeur de l’enrichissement des musées belges. Son fonds du Patrimoine a pour vocation de conserver les œuvres dans le pays et de les faire connaître. Au cours des trente dernières années, elle a ainsi constitué une collection comptant 27 000 pièces et 26 fonds d’archives, dont les objets sont confiés à des musées et des institutions. En 2022, elle a notamment déposé un tableau exceptionnel d’Albrecht Bouts au sein des musées de Bruges.

L’autre opération d’envergure menée par la fondation a été l’acquisition d’un ensemble remarquable d’œuvres graphiques de Félicien Rops : 66 feuilles provenant de la collection de Carlo de Poortere, soit le plus vaste fonds privé de Rops au monde. Cet ensemble comprend des dessins, des gravures avec texte et dessin en marge, mais aussi des lettres. Il a été déposé au Musée Félicien Rops de Namur, où il est actuellement exposé. Numérisé, il est aussi accessible sur le site de l’établissement.

Cet ensemble cohérent se distingue par sa mise en page étonnante. Dans cet exercice qu’il désigne comme « marginalia », Rops explore la notion de multiple. Afin de singulariser le tirage d’une gravure, il propose des variations en apposant des dessins et/ou des textes, créant une relation très moderne entre l’image et le mot. Le dessinateur facétieux de Namur joue souvent sur le télescopage entre deux registres afin de brocarder les mœurs de ses contemporains, à commencer par leur pudibonderie.

Fidèle à sa réputation sulfureuse, Rops flirte ainsi constamment avec la ligne rouge, multipliant les provocations scabreuses. Paniconographie nous montre ainsi un couple en plein ébat, tandis que Les Sonnets du doigt dedans croquent une jeune fille un doigt dans la bouche, l’autre dans le sexe. La religion n’est évidemment pas en reste, avec des dessins aussi provocants que Le Ravissement de sœur Marie Alacoque relatant l’orgie de la religieuse avec une flopée d’anges libertins.

Cet ensemble est à admirer au musée jusqu’au 5 mars 2023. L’établissement ferme ensuite ses portes pour deux mois de travaux. Ce chantier a pour ambition de rénover les façades de la maison dans laquelle est installé le musée, mais aussi de repenser son isolation et sa climatisation. L’établissement, qui dépend de la Province de Namur, a en effet entamé une réflexion sur la gestion écoresponsable du site et de ses activités. Ce chantier devrait permettre de réduire son empreinte carbone.