« Feature » et « Statements »

Valeurs sûres et chair fraîche

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 8 juin 2016 - 758 mots

Dans les grandes foires, ce n’est plus dans le secteur général que le visiteur fait des découvertes, mais dans les secteurs parallèles. À Art Basel, c’est « Feature » et « Statements » qui jouent ce rôle.

Avec trente-deux participants, le secteur « Feature » fait une nouvelle fois la part belle à des redécouvertes grâce à ses stands précisément scénographiés. Avant de se plonger cet été dans la Beat Generation, mise à l’honneur au Centre Pompidou, Frank Elbaz (Paris) réunit trois des acteurs du mouvement entrés dans une émulation collective à San Francisco. Sous le titre de « Collaborative Mysticism », l’accrochage de peintures et collages signés des noms mythiques que sont Wallace Berman, Bruce Conner et Jay DeFeo, quoique formellement différents, souligne des communautés de points de vue.

Issu également de la Côte ouest, Pat O’Neill, un pionnier du cinéma d’avant-garde américain, est présenté sur le stand de Cherry & Martin (Los Angeles). Est montrée pour la première fois en Europe la réédition de son film à trois canaux Saugus Series (1974), ainsi qu’une monumentale sculpture en fibre de verre de la même époque.

Susanne Vielmetter (Los Angeles) devrait une nouvelle fois attirer l’attention avec un solo show consacré à Sadie Benning, dont le travail pictural qui transcende les catégories interpelle toujours et encore. L’accrochage séquencé inscrit dans la lecture de ses tableaux des intervalles temporels censés mimer la contingence présente dans ses anciennes vidéos et animations.
Le groupe ZERO est à l’honneur sur le stand de Löhrl (Mönchengladbach, Allemagne) à travers la figure d’Otto Piene et des peintures exécutées avec du feu ou des sculptures lumineuses.

Conceptuel et Dada
Chez Grimm (Amsterdam), c’est l’art conceptuel du regretté Ger Van Elk, disparu en 2014, qui est exposé. À côté des vidéos des années 1970 et de la série de drôlissimes photographies dans lesquelles il explique être le cofondateur du mot « OK » (Co-founder of the Word OK, 1971-1999), une peinture recouvre une photo réalisée peu de temps avant sa mort. Espaivisor (Valence) met quant à lui en exergue le conceptuel Braco Dimitrijevic et ses interventions urbaines des années 1960 et 1970.
Une autre forme d’art conceptuel est proposée par Chert (Berlin), avec le travail de l’Allemande Ruth Wolf-Rehfeldt, née en 1932, très investie dans le mouvement international du Mail Art. Aux côtés de ses Typewritings Series, compositions de lettres exécutées à la machine à écrire entre 1970 et 1989, date de la chute du mur de Berlin, sont présentés des collages tardifs effectués sur la base de ses œuvres plus anciennes.
Le centenaire du mouvement Dada est quant à lui célébré par la Galerie Zlotowski (Paris) grâce à une sélection d’une vingtaine de collages de Kurt Schwitters réalisés entre 1919 et 1947 ; une magnifique occasion de revenir aux racines d’une culture du déchet et de la récupération qui n’a, depuis, cessé de faire des émules.

Des « Statements » qui décoiffent
Parmi les enseignes, au nombre de quatorze, regroupées dans le secteur « Statements », consacré aux plus jeunes artistes, Grey Noise (Dubaï) effectue un retour avec l’artiste dubaïote Lantian Xie ; à travers un film, des dessins de fragments urbains ou des objets comme abandonnés, celui-ci joue du décalage entre temps suspendu et anticipation vers le futur afin de maintenir le spectateur dans une énigme. Chez Arratia Beer (Berlin) est projetée la nouvelle production filmique de Mary Reid Kelley accompagnée de deux caissons lumineux en figurant des personnages. This Is Offal s’intéresse à la question du suicide sur un registre qui se révèle tragicomique.

L’Australienne Helen Johnson est présentée chez Mary Mary (Glasgow) avec un ensemble de quatre nouvelles peintures double face de grand format librement accrochées sur une structure spécifiquement conçue à cet effet. Leurs sources iconographiques proviennent de performances du théâtre universitaire des années 1970 et du vaudeville mis en scène dans des films australiens du début du XXe siècle. Décoiffante, c’est également ce qu’avait promis d’être l’installation de Sol Calero sur le stand de Laura Bartlett (Londres). L’artiste vénézuélienne s’est fait une spécialité de ses intérieurs décalés inspirés de stéréotypes exotiques mais toujours en prise avec le contexte social. C’est ici un bureau de change qui est mis en scène, une manière de pointer la fragilité de la circulation des devises et la chaotique situation de l’économie vénézuélienne.

Le Canadien Steve Bishop prévoit lui aussi de transformer le stand de sa galerie, Supportico Lopez (Berlin), mais en garage inhabité. À travers l’installation vidéo qu’il présente à l’intérieur, l’artiste entend explorer la problématique du souvenir à l’aune des limites entre intimité et voyeurisme.

Les articles du dossier « Art Basel 2016 » du Journal des Arts

  • Art Basel 47 ouvre dans un marché plus tendu ></a></li>
	<li>Valeurs sûres et chair fraîche <a href=></a></li>
	<li>Ou l’art version « king size » <a href=></a></li>
	<li>Design Miami/Basel consolide sa formule <a href=></a></li>
	<li>Photo Basel se relance <a href=></a></li>
	<li>Bâle au centre du monde <a href=></a></li>
	<li>Un secteur en recomposition <a href=></a></li>
	<li>Les galeries sortent le grand jeu <a href=></a></li>
</ul>
</div></p></div></body></html>

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°459 du 10 juin 2016, avec le titre suivant : Valeurs sûres et chair fraîche

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque