Foire & Salon

Art Basel 2016, une sérénité fébrile

Art Basel 47 ouvre dans un marché plus tendu

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 8 juin 2016 - 979 mots

Toujours aussi sûre d’elle et dominatrice, la Foire internationale d’art contemporain de Bâle ouvre le 16 juin dans un contexte moins euphorique que lors des éditions précédentes.

Interroger l’univers domestique dans un environnement qui, non seulement ne l’est pas, mais voit en plus défiler pendant plusieurs jours des milliers de personnes aux cultures et conceptions différentes de la domesticité : voilà ce que s’employe à faire la nouvelle installation d’Oscar Tuazon, Zome Alloy, posée sur la stratégique place de la foire durant la 47e édition d’Art Basel, qui se tient à Bâle du 16 au 19 juin. Inspirée par une structure modulaire et extensible imaginée et mise en pratique au Nouveau-Mexique par l’ingénieur Steve Baer, cette architecture a longtemps été considérée comme illustrative des réflexions urbaines et architecturales menées par les hippies américains. Elle est en outre le cadre de rencontres sur les développements des constructions alternatives.
Des hippies les visiteurs d’Art Basel ? Certes non, mais la foire demeure un lieu de rencontres privilégié dans le monde de l’art et cette installation constitue un point de passage où certains trouveront peut-être matière à réflexion.

Avec 286 exposants cette année, soit deux de plus qu’en 2015, et des nouveaux entrants en petit nombre – joségarcía.mx (Mexico), Bergamin & Gomide (São Paulo), Simone Subal (New York), Selma Feriani (Sidi Bou Said)… –, il n’est nul bouleversement à attendre dans la physionomie du salon. Les équilibres géographiques restent les mêmes, avec une large domination des enseignes occidentales.

Ralentissement du marché
Marc Spiegler, directeur d’Art Basel dans toutes ses éditions, qui garde la haute main sur le rendez-vous suisse, insiste sur la nécessité de maintenir l’escale bâloise arrimée à l’art européen et américain. D’autant que celle-ci est la seule à proposer une offre moderne qui conserve encore une certaine ampleur. Il met en outre l’accent sur la nécessité de doter d’une identité distincte ses trois foires (Bâle, Miami, Hongkong) : « Nous ne voulons pas rendre compte d’un monde globalisé, mais d’un monde internationalisé, c’est-à-dire qui ne soit pas homogénéisé », insiste-t-il.

Pour les heureux participants, Bâle revêt toujours une importance considérable, qui pourrait être cette année pour beaucoup d’entre eux capitale. Cofondatrice d’Air de Paris, Florence Bonnefous relève ainsi : « Art Basel est toujours indispensable. Il y a toujours moins de ventes en galerie, où le public international passe moins nous voir. À l’inverse, on croise tout le monde à Art Basel. C’est la seule foire, avec la Fiac [Foire internationale d’art contemporain], où nous présentons toujours au moins dix artistes, ce qui représente presque notre programme de l’année. » Il est vrai que malgré les records en ventes publiques, les chiffres élogieux dispensés ci et là, le marché s’est brusquement raidi et montre des signes de ralentissement, tant en Europe qu’aux États-Unis, hormis pour les très grosses galeries qui visent les très grands collectionneurs. Selon Chantal Crousel, « nous assistons à un net ralentissement depuis la fin de l’année dernière, avec tous les événements et les inquiétudes sur le plan économique et politique. Les gens qui ont beaucoup fait grimper les prix sont les mêmes qui aujourd’hui sont plus hésitants et se retiennent davantage. “Bâle” reste la foire où la galerie fait son meilleur chiffre, avec le plus grand nombre de visiteurs motivés et intéressés venant du monde entier ; nous espérons qu’il en sera de même cette année. »

Peu de prises de risque
Fondateur d’Art : Concept, Olivier Antoine constate lui aussi des freins très nets sur le marché. « La situation économique mondiale a changé depuis le mois de janvier, analyse-t-il. Il y a moins d’enthousiasme au Moyen-Orient, en Chine le marché s’est recentré nationalement, et cela ne se passe pas bien en Russie. Dans des périodes de transition économique et politique, le marché continue à fonctionner, mais il se reporte sur des œuvres sûres. » Ce qui va dans le sens de toutes ces résurgences d’artistes que les foires se font fort d’alimenter depuis quelque temps, alors que les galeries intègrent des valeurs reconnues. « Beaucoup de galeries cherchent à ajouter des artistes modernes, oubliés ou pas assez mis en valeur, car c’est plus rassurant pour les collectionneurs », note ainsi Chantal Crousel.

Ainsi sera-t-il intéressant de voir quelle est cette année la tendance sur le salon bâlois, dont on peut espérer quelques surprises, ou, plus probablement, si les galeries jouent la sécurité. D’autant que nombre d’acteurs pointent le fait que la valeur financière prend de plus en plus le dessus sur la valeur artistique. « On a la sensation que le marché reste structuré, ce qui est rassurant. Mais on parle de “marché” et pas d’envie de se cultiver, ce qui est le problème aujourd’hui. Nombre de collectionneurs n’ont pas des moyens illimités et aimeraient être davantage en relation avec des professionnels investis, mais ils sont écrasés par le poids des grands collectionneurs ou de la presse, qui font la part belle aux prix élevés ou aux expositions grandiloquentes. Ce sont moins les idées que les moyens qui priment », déplore Olivier Antoine.

« Le développement des foires a mis le collectionneur dans une position confortable, et lui permet, soit à son initiative, soit avec ses consultants, de remplacer la visite des expositions par celle des foires, ce qui a engendré profusion et superficialité », abonde Florence Bonnefous.
Se pose donc la question de la capacité des foires, et Art Basel en particulier, à insuffler un contenu face au rouleau compresseur des chiffres et des ventes aux enchères. Chantal Crousel se montre optimiste : « La foire peut toujours jouer un rôle en sélectionnant avec sévérité les œuvres montrées sur les stands, ce que font toutes les bonnes foires. » À suivre donc…

ART BASEL

Directeur : Marc Spiegler
Nombre d’exposants : 286
Tarif des stands (section générale) : 755 CHF (682 €) le mètre carré
Nbre de visiteurs en 2014 : 98 000

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<b>Informations pratiques</b> : Art Basel 47 - du 16 au 19 juin 2016, Messe Basel, halls 1 et 2, Messeplatz, Bâle (Suisse)
tlj 11h-19h, entrée 50 CHF (45 €)
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<a  data-cke-saved-href=www.artbasel.com

    Légende Photo :
    Art Basel sur Messeplatz à Bâle © Art Basel - 2015

     

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°459 du 10 juin 2016, avec le titre suivant : Art Basel 47 ouvre dans un marché plus tendu

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