Le nouvel an à Drouot : incunables et livres illustrés

Objets haute Époque, correspondance de René Magritte

Le Journal des Arts

Le 1 janvier 1996 - 578 mots

Mois traditionnellement maigre dans les salles de vente, janvier verra tout de même quelques vacations intéressantes à Drouot : des incunables et des livres illustrés ainsi que des objets haute Époque chez Me Jacques Tajan, une correspondance de René Magritte chez Me Laurence Calmels, et la bibliothèque musicale de la comtesse de Chambure chez Me Rémi Ader.

PARIS - Un troisième rendez-vous est pris, le 22 janvier chez Me Jacques Tajan, pour le très important Livre d’heures à l’usage de Salisbury, dont la mise en vente avait été repoussée par deux fois l’an dernier en raison d’un désaccord entre héritiers. Copié à Bruges, vers 1435, pour un très riche (et très pieux) client anglais, le livre est orné de 28 grandes peintures de qualité exceptionnelle, attribuables à l’artiste connu sous le nom du "maître d’heures aux rinceaux d’or". Muni de son certificat de libre circulation, il est estimé 2 millions de francs.

Un Christ en cuivre
Figureront également dans la vacation quelque 200 lots, principalement des livres illustrés français romantiques et modernes, dont Le Café concert de Montorgueil, illustré de 11 lithographies de Toulouse-Lautrec, et L’Enchanteur pourrissant d’Apollinaire, illustré par Derain, tous deux estimés autour de 80 000 francs.

Le 29 janvier, la haute Époque sera à l’honneur chez Me Jacques Tajan. Sa vente comprendra du mobilier, principalement des coffrets et des armoires, des objets usuels, tels que coffrets de messager et mortiers, ainsi que des objets de dévotion. Une belle paire de flambeaux, polychrome, fin XVIIe, de la Lombardie du Nord, est estimée entre 6 000 et 8 000 francs ; une solide paire de tabourets de chantre, Lorraine, également XVIIe, entre 15 000 et 18 000 francs ; un Christ en cuivre, XIIIe, des ateliers limousins, quelque peu usé mais de composition charmante, entre 15 000 et 20 000 francs, et un important coffre gothique du XVe siècle, entre 200 000 et 250 000 francs.

390 lettres, adressées pendant neuf ans par René Magritte à l’instituteur, bibliothécaire et poète André Bosmans, seront mises en vente le 24 janvier par Me Lau­rence Calmels. Témoi­gnage des dernières années de la vie de l’artiste belge, cette correspondance a débuté en 1958, lorsqu’André Bosmans, qui faisait alors son service militaire, écrivit à René Magritte pour lui exprimer son admiration.

La représentation des idées
Parmi les lettres, estimées entre 2 000 et 15 000 francs, qui seront dispersées seules ou en lots, se trouvent plus de soixante études préparatoires pour des tableaux – dont six sont restés à l’état de projet –, et des écrits théoriques sur la peinture. Ces derniers couvrent pour la plupart des sujets aussi ardus que la problématique de la ressemblance, la représentation des idées et les symboles, et ont été rédigés pour la revue Rhétorique, fondée en mai 1961 par André Bosmans, à laquelle René Magritte collaborait étroitement.

Après deux ventes consacrées aux collections d’imprimés de la bibliothèque musicale de la comtesse de Chambure, Me Rémi Ader se tournera, le 31 janvier, vers ses manuscrits d’opéras, d’oratorios, de musiques de scène et de musique instrumentale et religieuse. Le clou de la vente, le volume de 48 ouvertures de Haendel transcrites pour clavecin et copiées vers 1745, est estimé 10 000 francs seulement.

Pionniers des ventes de bandes dessinées, le commissaire-priseur Me Claude Boisgirard et l’expert Frédéric Bosser disperseront, le 20 janvier, 150 dessins originaux de soixante illustrateurs, français et étrangers, provenant de couvertures de livres, de magazines et d’annonces publicitaires, estimés de 1 000 à 10 000 francs.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°21 du 1 janvier 1996, avec le titre suivant : Le nouvel an à Drouot : incunables et livres illustrés

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