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TRANSPORT D’ŒUVRES

Convelio, un nouvel acteur low-cost

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 19 juin 2019 - 734 mots

Créée en 2017, la plateforme de transport mise sur le numérique et la sous-traitance pour abaisser ses coûts et donc ses prix. Un pari risqué selon ses concurrents, qui estiment qu’il lui sera difficile d’entrer dans le marché des musées et des grandes galeries.

Paris. Depuis une trentaine d’années, le secteur du transport d’œuvres d’art a explosé. Face à cette croissance du métier – bien que les coûts des transporteurs n’aient cessé d’augmenter –, le marché connaît de nouveaux entrants, à l’instar de Convelio. Confrontés à des problèmatiques de logistique dans leurs expériences professionnelles passées, Édouard Gouin et Clément Ouizille ont cofondé cette structure en septembre 2017. « Nous avons souhaité apporter des solutions au transport d’œuvres d’art et le digitaliser au maximum, face à des prix prohibitifs, des délais d’obtention de devis trop longs – en moyenne 48 h à cinq jours – et un maillage géographique lacunaire », raconte Édouard Gouin. Vécus comme une contrainte par les galeries d’art – elles dépensent en moyenne entre 30 000 et 300 000 euros par an – l’opacité et les montants faramineux de la logistique pèsent sur la vente. Aussi, pour baisser les coûts, Convelio a adopté un modèle totalement externalisé contrairement aux autres transporteurs qui ont leurs propres camions, emballeurs… « Nous travaillons avec des partenaires. Ce sont eux qui réalisent toutes les tâches », explique le cofondateur. La plateforme de la start-up est dotée d’un algorithme qui calcule instantanément le prix du transport (avec paiement en ligne). « Aucun de nos concurrents ne propose ce service », annonce fièrement l’entrepreneur. « Ainsi, globalement, nous sommes 35 % moins cher », se félicite-t-il.

Des concurrents sceptiques

« Je suis très circonspect. Je ne sais pas comment ils obtiennent ces prix, à moins “d’ubériser” au maximum. La logistique, ce n’est pas magique. Avec le gasoil à 1,65 euros, je ne fais pas de miracle ! », commente Gwenaël Rimaud, PDG de LP Art, l’un des leaders du secteur (44 millions d’euros de chiffre d’affaires). À titre d’exemple, pour un tableau d’une valeur de 5 000 euros envoyé de Paris à New York, il faut débourser selon la plateforme 830 euros. « Chez nous, il faut compter autour de 1 000 euros, mais tout dépend de la douane, qui prend du temps, donc de l’argent. En fait, il est difficile d’avoir un prix standard, car beaucoup de critères entrent en compte », précise Motet de la Panouse, directeur commercial chez André Chenue, l’autre acteur majeur du secteur.

Existe-t-il alors un marché pour ce type d’offre ? Pour Motet de la Panouse, « ce service ne peut rester limité qu’aux petites et moyennes structures. C’est très bien pour le transport d’œuvres de moins de 10 000 euros, mais nous ne sommes pas du tout sur le même segment. Nous avons une clientèle très haut de gamme qui recherche une relation qualitative basée sur la confiance avec le transporteur ainsi qu’un vrai travail de conseil. Elle ne cherche pas à rogner sur les prix ». Ce que confirme un galeriste : « Je suis habitué à mon transporteur, il me connaît et sait ce que j’attends de lui. »« En tout cas, ce n’est pas une société qui va nous impacter directement. Mais pour des galeries, des artistes qui n’ont pas vraiment de budget et qui ont des œuvres de petites valeurs, il y a peut-être un marché. Au-delà, ça ne peut pas fonctionner. On ne peut pas traiter des œuvres d’art comme un colis Fedex », estime, quant à lui, Alexandre Bovis, directeur du transporteur Bovis Fine Art.

Avec un bureau à Paris et à Londres, plus d’une centaine de partenaires, 460 clients (galeries, maisons de vente, collectionneurs, designers d’intérieur ou plateformes d’e-commerce) et 1 600 transports effectués sur les quinze premiers mois, dont 63 % depuis l’Europe vers les États-Unis, Édouard Gouin et Clément Ouizille ont de fortes ambitions : « Devenir l’un des leaders dans le domaine qui représente, selon nos estimations, 16 milliards de dollars ». La route est encore longue, donc, puisque Convelio affiche un chiffre d’affaires« largement au-dessus du million d’euros » sans vouloir en dire plus. Bénéficiaire jusqu’en septembre dernier, l’entreprise a ensuite fait beaucoup d’investissements en technologie et recrutements après une levée de fonds en juillet 2018 (1,85 M€). Déficitaires sur la fin d’année, « nous avons prévu de l’être pendant encore un an et demi avant de redevenir bénéficiaires », annonce Édouard Gouin. D’ici là, la jeune pousse souhaite poursuivre son développement, essentiellement sur la partie digitale, et cherche de nouveaux investisseurs.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°526 du 21 juin 2019, avec le titre suivant : Convelio, un nouvel acteur low-cost

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