Dictionnaire

Pierre Daix, « Le nouveau dictionnaire Picasso »

Pierre Daix réédite un ouvrage original par sa forme sur le monde picassien

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 3 janvier 2012 - 506 mots

Seul un géant comme Picasso peut faire l’objet d’un dictionnaire pour lui tout seul. Et le sujet semble inépuisable puisque Pierre Daix, va rééditer (parution le 16 janvier) en le complétant, son Dictionnaire Picasso paru il y a quinze ans.

Mille pages, plus de deux mille entrées, l’ouvrage est bien à la mesure du personnage et de son œuvre. Il est vrai qu’un grand nombre des notices concerne les œuvres de Picasso, une forme d’anthologie non illustrée. C’est d’ailleurs cette absence de reproduction qui est le point faible de l’ouvrage ou du moins qui crée un peu de frustration chez le lecteur. Et comme Picasso ne donnait jamais de titre à ses tableaux, sauf rares exceptions (Guernica), la recherche, ailleurs, de l’illustration correspondante n’est pas aisée. Mais les coûts iconographiques à reverser à la succession Picasso étant incompatibles avec le petit prix de la Collection Bouquin, il faut se contenter des descriptions et surtout des explications ou anecdotes, souvent pertinentes de Pierre Daix. À elles seules les entrées comportant le mot « femme » occupent trente pages, sans compter toutes celles ayant trait aux femmes et maîtresses de Picasso. De Femme accoudée à Femme tenant un éventail, le nombre de ces notices témoigne de leur importance dans la vie et l’œuvre de l’artiste, malgré le paradoxe (apparent) d’un Picasso très soucieux de ne « jamais discuter des affaires de famille en dehors », comme de ne pas parler du Parti Communiste (PC) hors du cercle des camarades.

Daix et Picasso ont tous deux appartenu au PC avec lequel ils ont entretenu des relations complexes. On se précipite donc sur la notice Communisme, pour réaliser qu’elle n’occupe qu’une toute petite page. Daix y dédouane son ami (et lui-même par la même occasion) des reproches d’adhésion à un parti affilié au totalitarisme soviétique, en invoquant rapidement un idéal de « solidarité et d’espérance ». Même constat de laconisme, pour la révélation – qui date de 2003 et justifie en partie la réédition de cet ouvrage –, de sa demande de naturalisation française déposée en avril 1940 et demeurée sans suite.

Fort heureusement toutes les notices ne sont pas du même tonneau. Celles sur les peintres ayant plus ou moins approché Picasso, sont fort instructives. Matisse le grand rival bien sûr, mais aussi l’ami Braque, Derain, Léger, c’est tout le XXe siècle artistique qui défile. Il n’était donc par vraiment utile de faire aussi entrer les peintres contemporains (Louis Cane, Zao Wou-Ki), qui ont une dette à l’égard de Picasso, sauf à vouloir régler quelques comptes comme il le fait avec Pontus-Hultén et Pierre Restany à propos de César. Daix revendique une connaissance intime de Picasso et n’hésite pas à égratigner tel critique ou historien d’art lorsqu’il s’appuie trop sur des sources livresques. Cette liberté de ton, qui lui vaut d’être un peu mis à l’écart de la communauté muséale, pimente un dictionnaire que l’on a envie de lire de bout en bout.

PIERRE DAIX, LE NOUVEAU DICTIONNAIRE PICASSO

Éd. Robert Laffont, collection Bouquins, 1024 p., 30 €, ISBN 978-2-221-11627-5

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°360 du 6 janvier 2012, avec le titre suivant : Pierre Daix, « Le nouveau dictionnaire Picasso »

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