Éditorial

Le « in » et le « off »

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 5 juillet 2017 - 422 mots

TOURISME CULTUREL - Fait-on encore du théâtre populaire dans le « in » d’Avignon ? se demande L’Obs à l’occasion du 70e anniversaire du festival créé par Jean Vilar.

Notre confrère se garde bien de poser la question pour le « off » car ici la réponse est indiscutablement positive. Avec une programmation qui mélange allègrement théâtre expérimental ou classique et comédies style café-théâtre, le « off » attire 10 fois plus de spectateurs que le « in », dans un nombre, il est vrai, plus élevé de lieux. Et puisque l’affiche officielle a été confiée à l’artiste Ronan Barrot, qui expose par ailleurs dans la cité des Papes (voir page 5), l’occasion est toute trouvée pour se poser la question à propos des arts plastiques : sont-ils, non pas toujours, mais enfin populaires ?

Le clivage « in/off » d’Avignon opère aussi pour les arts. Les biennales d’art contemporain, certaines expositions dans les centres d’art ou « carambolages » entre différentes cultures dans des musées pourraient être aux arts plastiques ce que le « in » est à Avignon. À l’image du Sophocle joué cette année dans la cour d’honneur en japonais sous-titré en français, la manifestation officielle est réputée plus élitiste, comme l’est la Biennale de Venise, celle de Lyon, la Documenta de Cassel ou la programmation du Frac Île-de-France. Cela ne veut pas dire que leurs publics respectifs sont constitués uniquement de cadres supérieurs surdiplômés. Selon Olivier Py, directeur du festival d’Avignon, le spectateur moyen du « in » est une femme, enseignante, âgée de 47 ans. À Venise ou Lyon, le visiteur s’est considérablement diversifié en vingt ans. En somme, un art plus exigeant pour un public plus averti.

Le « off » dans les arts, c’est la programmation de dizaines de musées, surtout dans les lieux de villégiature qui mettent les petits plats dans les grands et organisent leur grande exposition annuelle avec des artistes impressionnistes ou modernes. En art contemporain, le « off » ce sont tous ces lieux touristiques qui installent des œuvres de grand format, d’un abord plus immédiat, en pleine nature ou dans la ville. Le « off », plus encore, ce sont ces centaines de salons de province qui exposent des œuvres d’amateurs, pour la plupart très médiocres, qui plaisent au public populaire qui ne va jamais au musée, précisément parce que ces œuvres sont faciles.

Mais ce qui fait le charme d’Avignon et qui, avouons-le, manque un peu dans les expositions d’art, qu’elles soient « in » ou « off », c’est l’agitation qui secoue la ville, les affiches qui envahissent les murs, les saltimbanques qui distribuent des tracts, noyant les passants dans une ambiance de kermesse.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°483 du 7 juillet 2017, avec le titre suivant : Le « in » et le « off »

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