XIXe

Millet et Lhermitte, deux visions du monde paysan

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 3 janvier 2017 - 497 mots

Tous deux liés à Reims, mais à des périodes différentes, les deux peintres ne regardent pas de la même façon le monde rural.

REIMS - En attente d’importants travaux d’agrandissement, le Musée des beaux-arts de Reims consacre un petit espace de son rez-de-chaussée à des expositions d’œuvres tirées de ses collections sous le titre générique de « Regard sur… ». En ce moment, l’accent est mis sur les œuvres sur papier de deux grands peintres du monde paysan, Jean-François Millet (1814-1875) et Léon Lhermitte (1844-1925). Il se trouve que tous deux sont liés à Reims et à ses grandes maisons de champagne : en 1890, la veuve Pommery acheta Des Glaneuses de Millet pour en faire don au Musée du Louvre, mettant fin par la même occasion à des rumeurs de difficultés de son entreprise. Quant à Lhermitte, il était particulièrement apprécié du directeur de la maison Pommery, Henry Vasnier, qui acquit son grand tableau Le Vin en 1885. Le peintre a également conseillé le collectionneur dans ses achats d’œuvres d’art, léguées au Musée de Reims en 1907, à la mort d’Henry Vasnier.

Un univers rural de plus en plus apprécié
C’est en grande partie grâce à cette libéralité que peuvent être présentés aujourd’hui dix papiers de Lhermitte et quatre de Millet, ainsi qu’une toile de ce dernier et quelques œuvres en rapport, sous le titre « Regard sur… Lhermitte dans le sillage de Millet ? ». « Nous tenons beaucoup au point d’interrogation, précise la commissaire de l’exposition, Catherine Delot, directrice du musée. Car les deux peintres ne sont pas de la même génération et leur approche du monde paysan est complètement différente, comme l’était d’ailleurs la perception qu’en avait le public. » Alors que Millet a dû se battre pour imposer ses choix, Lhermitte est arrivé à un moment où les paysans étaient devenus un sujet apprécié de la bourgeoisie, d’où les nombreuses commandes de fusains qu’il reçut. Une eau-forte de Léopold Lesigne, l’Angelus d’après Millet, exécutée en 1890 (le tableau était de 1859), rappelle cette évolution des mentalités.

Marie-Hélène Montout-Richard, conservatrice au Musée de Reims et l’une des rédactrices du Petit Journal de l’exposition, précise d’autre part que « chez Millet, les visages sont plus effacés, quand Lhermitte est plus narratif. » Tous deux ont été admirés de Van Gogh, qui les comparait à Michel-Ange et Rembrandt. En montrant ces magnifiques œuvres rarement exposées – La Fileuse (1891), un fusain de Lhermitte entré au musée en 1997 est même présenté pour la première fois – Catherine Delot passe le relais au public qui peut « questionner le réalisme et le naturalisme », redécouvrir Millet qu’il croit connaître et tomber sous le charme de Lhermitte, bien oublié aujourd’hui. Les notices très complètes des œuvres, publiées dans le Petit Journal remis gratuitement aux visiteurs, font revivre un monde paysan oublié et lui rendent la place qu’il a tenue dans l’histoire de l’art.

LHERMITTE et Millet

Commissaire : Catherine Delot, directrice du Musée de Reims.
Nombre d’œuvres : 19

REGARD SUR… LHERMITTE DANS LE SILLAGE DE MILLET ?

Jusqu’au 26 février, Musée des beaux-arts, 8 rue Chanzy, 51100 Reims, tous les jours sauf mardi 10h-12h et 14h-18h, entrée 4 € avec le Petit Journal.

Légende Photo :
Jean-François Millet, Berger gardant son troupeau, vers 1865, crayon noir, pastel sec et estompe sur mise au carreau au pastel sec sur papier vélin grège, 74,5 x 98,4 cm, Musée des beaux-arts, Reims. © Photo : MBA/Christian Devleeschauwer.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°470 du 6 janvier 2017, avec le titre suivant : Millet et Lhermitte, deux visions du monde paysan

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