Art Saint-Germain-des-Prés : un déséquilibre persistant

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 6 mai 2014 - 713 mots

La manifestation annuelle du quartier de Saint-Germain-des-Prés, qui, depuis l’an dernier, souhaite mettre en exergue trois spécialités, ne parvient pas à une représentation équilibrée.

PARIS - L’association Art Saint-Germain-des-Prés, qui organise depuis quinze ans un événement au printemps, se bat pour dynamiser le quartier. Selon Georges-Philippe Vallois, président du Comité professionnel des galeries d’art, « il est important de se fédérer et de créer l’événement à un moment où il semble difficile d’attirer le public et les médias en dehors des foires et des ventes publiques ». Avis que partage le président de l’association, Jean-Pierre Arnoux : « Il faut promouvoir Saint-Germain et ses activités et participer aux efforts de ceux qui veulent redonner à Paris la place qu’elle mérite sur le marché de l’art et qu’elle a perdue depuis longtemps. » Le thème retenu se veut lui aussi fédérateur : « Les Valeurs sûres » permet à chaque galeriste de défendre ce qu’il considère comme une valeur sûre, que ce soit un artiste, une période, un mouvement, une ethnie, un objet, une spécialité…

Cette année cependant, la concurrence se ressent fortement. Depuis l’an passé, le conseil de direction souhaite mettre en exergue, non pas la diversité du quartier mais trois spécialités (art moderne et contemporain, archéologie et art tribal, arts décoratifs et design), mais l’écart se creuse entre ce qui est proposé sur le papier et la réalité. « Il y a une relative défaillance de nos adhérents dans deux secteurs, en design mais surtout en art tribal car de nombreuses opportunités s’offrent aux marchands de ces spécialités. C’est la concurrence. Que puis-je y faire ? », déplore Jean-Pierre Arnoux. Concernant l’art tribal, le galeriste fait allusion à Paris Tribal, lancé en avril. Les marchands de ce secteur, qui participent déjà à deux manifestations (avec le Parcours des mondes), ne peuvent en alimenter une troisième. Restent pourtant fidèles à l’événement, les galeries Alain Bovis, Mermoz, Meyer et Furstenberg. Cette dernière montre une grande urne du dieu Cocijo Maïs-Serpent, en terre cuite, Mexique, culture zapotèque, 1000 apr. J.-C.

Participation en baisse
Sur le plan des arts décoratifs et du design, « nous sommes mieux équipés », indique Jean-Pierre Arnoux, même si manquent à l’appel L’Arc en Seine et Jousse Entreprise. La galerie Yves Gastou, nouvel adhérent, présente « Dancing Stone », de Gerard Kuijpers, soit des blocs bruts de marbre noir belge en équilibre sur une pointe d’acier qui peuvent être mis en mouvement. « Nous collons au thème de cette édition car la pierre est pour nous la valeur sûre par excellence », explique le galeriste. La galerie Downtown montre plusieurs pièces de Pierre Jeanneret, parmi lesquelles un fauteuil de cinéma, daté vers 1960, une commande spéciale pour la ville de Chandigarh (Inde), tandis que Maria Wettergren propose une exposition de Tora Urup, l’une des étoiles de la verrerie contemporaine scandinave.

Conséquence de ce repli, l’art moderne et l’art contemporain regagnent du terrain alors que l’association souhaitait mieux équilibrer les spécialités. Applicat-Prazan se focalise naturellement sur l’école de Paris des années 1950 et montre une toile de Maria Elena Vieira da Silva, Exode (1967) ; la galerie Jacques Dutko se concentre sur des œuvres de l’artiste contemporain Tom Henderson composées de panneaux en Plexiglas colorés et couverts partiellement de peinture à l’huile. Berthet-Aittouarès dévoile plusieurs encres de Chine d’Henri Michaux tandis que Vallois Sculptures consacre son espace au solo show de George. K, artiste indien, dont six sculptures en fibre de verre recouverte de coupures de journaux évoquent le « Navarasa », ou les neuf émotions capitales dans la culture indienne. La galerie Protée présente « Les couleurs du noir », avec des œuvres de Pierrette Bloch et André Marfaing. « Nous tenons à cette manifestation, outil de résistance contre l’invasion du prêt à porter dans ce quartier mythique, au détriment de ce qui est son âme : l’art sous toutes ces formes », explique la galeriste.

Recensant entre 70 et 80 participants il y a encore cinq ans, Art Saint-Germain-des-Prés n’en compte plus qu’une cinquantaine. « Les galeries qui vivotent ont du mal à faire face à toutes les manifestations qui sont proposées, par manque de trésorerie. D’ailleurs, les grandes galeries nous sont fidèles, comme les Vallois, Prazan, Downtown, Wettergren…, car elles n’ont pas de problème de financement », conclut Jean-Pierre Arnoux.

Art Saint-Germain-des-Prés

Du 22 au 25 mai, dans 51 galeries du quartier de Saint-Germain-des-Prés, Paris
www.artsaintgermaindespres.com

Légende Photo :
Gerard Kuijpers, Table basse cristallisée, pierre bleue belge, acier et verre, 150 x 90 x 46 cm. Courtesy galerie Victor Gastou, Paris.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°413 du 9 mai 2014, avec le titre suivant : Art Saint-Germain-des-Prés : un déséquilibre persistant

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