Et maintenant, la géolocalisation

Par Marie Guérin Habert · Le Journal des Arts

Le 29 janvier 2014 - 1439 mots

Le nombre d’applications muséales pour smartphone et tablette augmente lentement. Cela ne freine pas l’innovation avec l’arrivée de la géolocalisation qui adapte le contenu en fonction du déplacement des visiteurs.

Sur les 250 applications mobiles culturelles recensées en France à la fin de l’année 2013 (chiffres Club innovation et culture France), plus de 200 dispositifs concernent les musées. Ce chiffre ne tient pas compte de la multiplicité des supports – une même application pouvant être disponible sur plusieurs terminaux mobiles iOS ou Androïd. Les applications recensées peuvent être rangées en deux catégories : les dispositifs permanents des lieux culturels et ceux événementiels, mis en place dans le cadre d’une exposition temporaire. La répartition est équitable entre ces deux catégories. On compte ainsi 103 dispositifs permanents contre 109 applications d’expositions temporaires – ce dernier chiffre étant un cumul des dispositifs applicatifs mis en place depuis 2009. Les musées mettant en place le second type d’application sont généralement, mais pas systématiquement, des institutions déjà dotées d’une application permanente.

Les grands musées parisiens ne sont plus seuls
En termes de répartition géographique, l’Île-de-France apparaît – sans surprise – comme la région où les musées sont les mieux équipés en dispositifs numériques d’aide à la visite : 54 musées parisiens possèdent une application permanente contre 49 musées en région. Pour les expositions temporaires, seulement 15 % des applications recensées depuis 2009 concernent un musée en région. Malgré cette disparité quantitative, l’écart entre Paris et les autres régions se réduit progressivement. Pour Frédéric Durand, directeur associé de l’agence smArtapps spécialisée dans la médiation culturelle numérique, la démocratisation des applications est un des éléments significatifs de l’année 2013, qui se poursuivra en 2014 : « La démocratisation des applications au sein des musées va de pair avec leur industrialisation. Nous pouvons proposer aujourd’hui à tous les musées des applications clé en main adaptées à leurs besoins. Et même si seulement 5 à 10 % des musées français sont concernés par la médiation numérique applicative – et en particulier les grands musées parisiens – les applications s’adressent aujourd’hui à toutes les institutions muséales. » En région, les musées qui investissent dans le développement d’applications sont généralement les institutions de grandes villes comme Lyon, Lille, Grenoble ou Bordeaux. Quelques musées de villes plus petites, comme la Piscine de Roubaix ou le Musée d’archéologie de Saint-Raphaël, parviennent eux aussi à offrir de tels services. En 2014, ces musées ne devraient plus être des exceptions dans le paysage muséal français.

Concernant les supports, 2013 marque un changement important dans la disponibilité des applications sur supports Androïd. Les visiteurs équipés d’un smartphone ou d’une tablette Androïd ont pu se rendre compte que le nombre d’applications muséales disponibles sur Google Play allait croissant ces derniers mois. Ce développement plus important d’applications Androïd coïncide avec la fin du monopole d’Apple sur les terminaux mobiles des Français. En 2014, les musées devraient proposer systématiquement des applications pour terminaux iOS et Androïd.

Dans l’équipement numérique des Français, les tablettes tiennent également une place de plus en plus importante. L’enquête Deloitte France de septembre dernier rapporte qu’au moins un Français sur quatre est équipé d’une tablette numérique (le chiffre a doublé depuis fin 2012) et que deux Français sur trois possèdent au moins un terminal numérique mobile (tablette ou smartphone). Il n’est plus rare de voir des visiteurs parcourir les galeries d’un musée avec leur tablette à la main. Mais les applications dédiées à ce support sont encore peu nombreuses. D’ailleurs, « les musées ne développent pas systématiquement une application pour tablette. Ce n’est pas une question de budget, mais souvent un problème de ressources », explique Frédéric Durand. Autrement dit, pour développer une application dédiée à la tablette, il faut que les institutions aient des contenus à y mettre et des ressources humaines à y dédier.

Innovations profitables aux audioguides
Enfin, le développement des applications n’a pas mis fin aux dispositifs mobiles d’aide à la visite in situ. Les musées disposant d’applications pour les supports personnels des visiteurs proposent souvent des guides multimédias aux visiteurs. « Les visiteurs empruntent ces guides multimédias pour différentes raisons : ils n’ont pas le bon terminal pour télécharger l’application ou ils souhaitent un appareil dédié à la visite, pour ne pas décharger leur téléphone portable par exemple », précise Antoine Eisenstein, responsable de MyOrpheo, filiale du groupe Orpheo spécialisée dans les solutions mobiles pour les institutions culturelles. Sur certains sites, le taux d’utilisation de l’application est même inférieur à celui des dispositifs mobiles disponibles in situ. Les musées profitent des nouvelles technologies mobiles disponibles pour mettre leurs audioguides au goût du jour et les résultats obtenus dépassent souvent leurs prévisions.

Une révolution invisible
La technologie vedette de l’année 2014 sera la géolocalisation indoor (dans les murs). Tous les professionnels de la médiation numérique mobile (smArtapps, MyOrpheo, etc.) sont d’accord pour avancer que cette technologie marquera fortement les nouvelles applications qui sortiront cette année sur le marché. Jusqu’à maintenant, la géolocalisation indoor, c’est-à-dire la mise en place d’un GPS à l’intérieur des murs des muséesales, était très compliquée à installer, et lorsqu’elle était possible, son installation coûtait très cher. Maintenant que les difficultés techniques sont dépassées, les musées vont pouvoir utiliser cette technologie pour répondre à des besoins fonctionnels exprimés par les visiteurs et proposer de nouveaux contenus culturels (voir encadrés). Cette technologie va permettre de localiser très précisément les visiteurs dans le musée, et en l’intégrant à des applications mobiles, il sera possible de suggérer aux visiteurs des points d’intérêts dans les galeries des musées.

« Bienvenue » à la géolocalisation indoor

Universcience, établissement issu du rapprochement entre la Cité des sciences et de l’industrie et le Palais de la découverte, fait partie des premiers établissements culturels français à déployer son propre service de géolocalisation « dans les murs ». La dernière application mobile de l’établissement, astucieusement baptisée « Bienvenue » et mise gratuitement à disposition du grand public depuis octobre 2013, intègre en effet cette nouvelle technologie de positionnement. Comme l’explique Universcience dans son communiqué de presse, « le lancement de cette application mobile, disponible sur Androïd et iOS, concrétise la volonté de l’établissement de développer une stratégie d’accueil innovante au service du grand public ». L’innovation de cette application est de proposer aux visiteurs une cartographie interactive des espaces intérieurs des sites. La géolocalisation indoor permet ainsi aux visiteurs d’accéder à des informations et services géolocalisés à l’intérieur des sites. Chaque visiteur peut désormais savoir, à tout moment, où il se trouve dans le bâtiment. Il peut également repérer intuitivement tous les services disponibles (toilettes, restaurants, caisses, boutiques, etc.), consulter des informations actualisées en temps réel (agenda, exposition temporaire, événements, etc.) et profiter de parcours thématiques guidés. Ses itinéraires et déplacements se matérialiseront en 2D extrudée (2D mise en volume) et 3D sur les plans interactifs de l’application !

Un guide mobile innovant pour le MoMA

Le 29 octobre dernier, le Musée d’art moderne de la ville de New York (MoMA) inaugurait sa nouvelle plateforme mobile de distribution de contenus de médiation : le MoMA Audio . Ce nouvel outil d’aide à la visite, mis gratuitement à disposition des visiteurs, est un iPod touch qui permet à la fois d’écouter les commentaires audio d’une sélection d’œuvres et de partager et sauvegarder des contenus additionnels. En proposant uniquement des contenus audio, le nouveau guide numérique du MoMA reste très proche de l’ancien audioguide du musée. La dimension multimédia est limitée, mais les contenus proposés sont d’une grande qualité et disponibles en neuf langues.

L’innovation du MoMA Audio réside dans l’interactivité qu’il offre aux visiteurs au cours de leur visite des collections. Cette interactivité, à la base de l’expérience de visite numérique originale est double. Il s’agit tout d’abord d’une interactivité au sein du musée. Grâce à la géolocalisation indoor, le visiteur peut suivre facilement un des parcours proposés par le musée et se repérer facilement dans le bâtiment. L’interaction avec les œuvres est, elle, mise en œuvre grâce à la caméra intégrée à l’iPod qui permet à chaque visiteur de réaliser ses propres photos d’œuvres, etc. Il peut partager en temps réel ses photos et ses impressions avec ses contacts extérieurs via la boîte mail disponible sur le MoMA Audio . À l’issue de la visite, il pourra également récupérer ses photos, ainsi que les contenus consultés, dans son espace personnel sur le site Internet du MoMA.

Le MoMA Audio est donc une première étape dans le déploiement de la nouvelle stratégie numérique du musée. Grâce au mécénat de Bloomberg Philanthropy, le MoMA va continuer de développer cet outil en ajoutant des fonctionnalités supplémentaires (agenda du musée, réseaux sociaux) et proposera notamment une version téléchargeable, pour smartphones et tablettes, au printemps 2014.

Les articles du dossier Les musées face au numérique

  • Le numérique défie les musées ></a></li>
    <li>Quel rôle pour les réseaux sociaux <a href=></a></li>
    <li>Google séduit les musées français <a href=></a></li>
    <li>L’hermétique site web du Centre Pompidou <a href=></a></li>
    <li>Un neurologue juge les audioguides <a href=></a></li>
</ul>
</div>
</p></div></body></html>

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°406 du 31 janvier 2014, avec le titre suivant : Et maintenant, la géolocalisation

Tous les articles dans Actualités

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque