Art contemporain

Ivry-sur-Seine (94)

Simon Boudvin dissèque les objets

Crédac - Jusqu’au 20 mars 2022

Par Anne-Charlotte Michaut · L'ŒIL

Le 23 février 2022 - 343 mots

Qui, en France, ne se souvient pas de la première Renault Twingo qui a envahi les rues de nos villes et campagnes dans les années 1990 et 2000 ? Pour qui les verres Duralex ne riment pas avec repas à la cantine ? Au Crédac, Simon Boudvin révèle la portée symbolique et affective que revêtent ces objets fonctionnels, qui renvoient autant à des réalités sociales générationnelles qu’à des affects individuels.

Artiste-chercheur, il s’intéresse à l’histoire des formes, et à l’impossibilité de séparer le design de l’histoire des lieux et des populations. Au Crédac d’Ivry, il procède au démantèlement méthodique d’une Twingo I, récupérée alors qu’elle était en chemin vers la casse, et dévoile son anatomie de manière progressive dans l’exposition. Ainsi, il nous donne à voir la constitution de la voiture, depuis son ossature (la carcasse évidée), dans la première salle, jusqu’à ses entrailles (son moteur et réseau électronique), dans la dernière. Le principe de monstration scénographique renvoie autant à l’usine qu’au musée d’histoire naturelle, et l’architecture ouverte du centre d’art, avec ses grandes baies vitrées, accentue la relation de l’œuvre à la ville. Dans chaque salle, les éléments de la voiture côtoient trois autres types de production. Des photogrammes d’un verre Duralex pris dans un bar à Rome mettent à jour les mêmes empreintes de manière plus ou moins évidente, tandis que des tabourets roses, tous différents, peuplent les salles. À partir de l’étude du « bote-tchu », un siège monopode paysan, Simon Boudvin s’est intéressé aux multitudes de typologies possibles de tabouret. Produits au Crédac, ces sièges seront donnés à des ateliers jurassiens à la fin de l’exposition, et deviendront donc des objets fonctionnels. Enfin, des affiches aux motifs géométriques élémentaires, issus d’un relevé de façades d’immeubles que l’artiste a réalisé lors d’une enquête urbaine dans un quartier populaire d’Hanoï en 2016, sont affichées dans chaque salle. Derrière ces différentes recherches, unies par un même principe de déconstruction méthodique, « c’est l’être humain que Simon Boudvin s’emploie avant tout à mettre en avant », en révélant les implications sociales, culturelles, industrielles, et humaines des formes.

« Grain. Simon Boudvin »,
Centre d’art contemporain d’Ivry – Le Crédac, La Manufacture des œillets, 1, place Pierre-Gosnat, Ivry-sur-Seine (94), www.credac.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°752 du 1 mars 2022, avec le titre suivant : Simon Boudvin dissèque les objets

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